En réponse aux critiques qui s’accumulent à propos de l’« initiative citoyenne européenne », la Commission européenne a répondu qu’elle ne changerait rien. Bref, que la chose allait mourir de sa belle mort, sans qu’il y ait besoin de sédation profonde… Conformément à ce qui était prévu, mais cela elle ne le dit pas.
Mes lecteurs de Daoudal Hebdo se rappellent que j’avais suivi de près la délirante saga de la mise en place de l’« initiative citoyenne européenne ». Cette innovation démocratique majeure du traité de Lisbonne était censée permettre la participation des citoyens au processus de décision européen. C’était une exigence pour rapprocher les citoyens de Bruxelles, pour combler le « déficit démocratique » dont souffre l’UE, etc. J’avais montré, pas à pas, à quel point c’était du pipeau.
On remarquera que le texte de la Commission, pour le troisième anniversaire de l’« initiative citoyenne européenne », est daté du 31 mars. Or elle avait été lancée le 1er avril 2012. Comme un poisson d’avril. Mais la réponse aux critiques n’en est pas un.
Selon le traité de Lisbonne, l’« initiative citoyenne européenne » devait être mise en place dès l’entrée en vigueur du traité, mais la Commission avait encore mis deux ans et demi pour mettre au point le dispositif, en faisant croire que c’était une grande concertation entre le Conseil, le Parlement, et les citoyens, alors qu’elle décidait de tout toute seule (comme d’habitude).
Car il fallait faire en sorte qu’il soit impossible qu’une initiative citoyenne puisse aboutir à une remise en cause de quelque diktat que ce soit de la Commission, tout en faisant miroiter le progrès démocratique majeur de la chose.
On voit, trois ans plus tard, le résultat. 51 initiatives ont été enregistrées par la Commission. Sur ces 51, il y en a… deux qui ont abouti. Qui ont abouti… à rien.
La première a été celle du « droit à l’eau » (gestion publique de l’eau) qui demandait une proposition de loi reconnaissant le droit humain à l’eau, ou l’engagement formel de ne lancer aucune initiative incitant à libéraliser ce service, et la confirmation que les services d’eau et d’assainissement seraient exclus du Partenariat transatlantique. L’initiative citoyenne a effectivement pour finalité d’obliger la Commission à élaborer un projet de loi. Mais la Commission a répondu par de bonnes paroles strictement verbales…
La deuxième a été « Un de nous », l’initiative visant à protéger l’embryon humain, notamment en interdisant toute activité qui conduise à détruire un embryon. La Commission a répondu que c’était déjà « réglementé »… Les organisateurs ont porté plainte devant la Cour européenne de Justice, qui a obligé la Commission à formuler une nouvelle réponse. Celle-ci vient de le faire, ce même 31 mars. Elle répond… qu’elle a le droit de répondre comme elle l’entend. Sic.
Comme, le même jour, la Commission fait savoir qu’elle ne changera rien au processus, on voit que la preuve est faite que c’était une mauvaise farce, et qu’il faut être singulièrement optimiste, ou plutôt inconscient, ou avoir du temps à perdre, pour tenter de nouvelles initiatives.
D’ailleurs les demandes ont déjà chuté de façon spectaculaire l’an dernier.