Par Alain Sanders
Combien y a-t-il eu d’adaptations cinématographiques de Jane Eyre, ce grand roman de Charlotte Brontë paru en 1847 ? Au moins huit. On fait grand cas, à tort à mon goût, de la version de Robert Stevenson de 1994 : si Joan Fontaine tient la route, Orson Wells, outrancier, bavard, agité, passe totalement à côté du personnage de Rochester.
On retiendra donc la version de Franco Zeffirelli de 1996. Avec un William Hurt formidable d’intelligence, lui, et fidèle au roman. Dans le rôle-titre, Charlotte Gainsbourg est le personnage : point trop jolie, effacée, discrète, mais dure et forte tout à la fois.
Romantique Jane Eyre ? Plus romantique, tu meurs ! Et l’on meurt beaucoup dans l’histoire de cette petite orpheline livrée d’abord à une tante et à des cousins sadiques, placée ensuite dans une école tenue par un demi-fou pervers, puis engagée comme gouvernante au château de Thornfield où, emportée par l’amour, elle réapprend doucettement à vivre.
Dans un des tomes de ses Journaux, Julien Green note : « Relu une partie de Jane Eyre, simplement pour ne pas oublier ce que c’est qu’un grand roman. J’aime les maladresses de ce livre, ce mélange de gaucherie et d’audace, l’intarissable sérieux de l’auteur. »
Sans avoir l’air d’y toucher, Charlotte Brontë excelle en effet à suggérer la sensualité de son héroïne. Moderne Jane Eyre ? Cent fois plus que certaines grognasses caricaturales.