C’est difficile à croire de nos jours, mais en 1970 il n’y avait que 100 mosquées sur le territoire français ; la plupart étaient d’ailleurs dans des foyers de travailleurs immigrés. Aujourd’hui, il y a plus de 2400 mosquées et salles de prière sur le territoire. Près de 400 autres mosquées vont être construites dans les prochaines années.
Bien que la France soit un pays sur-administré, il n’existe pas, curieusement, ni de chiffre exact des lieux de culte musulmans en France, ni de nombre officiel des musulmans en France. Selon que l’on croie l’INED ou le Conseil Français du Culte Musulman, le nombre de personnes de culture musulmane (c’est à dire issues de pays musulmans ou qui en tirent leurs origines familiales) oscille entre 2,3 et 7 millions. Le nombre de pratiquants fait aussi le grand écart, de 2,1 à 4,5 millions, selon les estimations et les sources. Les estimations sont d’autant plus floues que le chiffre de l’INED estimant qu’il y a 2,1 millions de pratiquants musulmans en France se base sur un sondage qui ne prend en compte que la population de 18 à 50 ans, en 2008.
Selon un sondage IFOP plus récent, datant de 2011, les musulmans seraient 3,5 millions en France. Parmi eux, 71% font le Ramadan – dont une bonne partie pour des raisons plus culturelles et communautaires que religieuses – et un quart (25%) seulement vont à la mosquée. Près de 41% pratiquent l’islam, ce qui représente 1. 435.000 pratiquants musulmans en France métropolitaine. Selon ce sondage, cité par le site communautaire musulman Saphir News « La population musulmane se répartie essentiellement à l’est d’une ligne imaginaire Le Havre-Perpignan. En moyenne, sur l’ensemble du territoire, elle représente 5,8 % de la population ». Dans trois départements de la région parisienne – le 93 (Seine-saint-Denis), le 94 (Val de Marne) et le 95 (Val d’Oise), les musulmans représentent plus de 10% de la population. Dans la région lyonnaise (Rhône et métropole de Lyon, Ain, Loire), le territoire de Belfort, les Alpes de Haute-Provence et l’Eure-et-Loir les musulmans représentent 7.8% à 9.9% de la population.
Nous avons fouillé les statistiques, et celles-ci réservent une surprise. Entre 1979 et 1987, le nombre de lieux de culte musulman augmente de … 417% sur le territoire, passant de 200 à 1035. Cette évolution a cependant une explication : c’est à cette époque que sont construites de nombreuses salles de prières, qui remplacent des installations provisoires ou des prières faites dans les terrains vagues, des appartements ou sous des préaux.
Puis de 2003 à nos jours on constate une nouvelle évolution à la hausse, le nombre de mosquées et de salles de prière passant en dix ans de 1600 à 2449, soit une augmentation d’un tiers. Tandis que la population d’origine musulmane ne cesse d’augmenter, portée par une natalité plus importante, le regroupement familial et l’arrivée aussi de nouveaux immigrés issus de plus en plus des pays de l’Afrique noire musulmane, les lieux de culte existants commençaient à devenir trop étroits. D’où d’ailleurs les prières de rue – notamment dans le quartier de la Goutte d’Or à Paris – qui eurent leur quart d’heure de gloire dans les médias.
A ce manque de lieux de culte s’ajoute un certain clientélisme des édiles locaux qui voient dans ces projets une façon de favoriser des communautés qui peuvent être numériquement influentes, quitte à tourner la loi de 1905 en ne subventionnant pas un édifice religieux, mais des activités culturelles telles que l’apprentissage du turc ou de l’arabe. Bref, les projets de mosquées se multiplient. A la date du 29 juin 2015, le site de la muslimosphère Des domes et des minarets estimait qu’il y avait 393 projets en cours.
Cependant, la plupart des lieux de culte musulmans sont des salles de prière, souvent discrètes d’apparence, voire cachées dans une cour ou un immeuble. En juin 2015, le journal 20 minutes estimait que « moins d’une centaine de ces lieux [de culte] mesurent plus de 1 000 mètres carrés, et une trentaine seulement sont coiffés d’un minaret, toujours muet ». Parmi ces derniers, la mosquée turque de Nantes, à la Janvraie, et son haut minaret proche du pont de Cheviré.
L’augmentation du nombre de lieux de culte musulmans pose un autre problème, car il s’accompagne d’une forte ingérence étrangère à la fois dans la formation des imams et le financement des plus grands édifices, notamment les « grandes mosquées » des villes principales. Parmi ces mécènes : le Qatar (qui a notamment payé une grande partie des travaux de la mosquée Assalam, située dans le quartier sensible de Malakoff à Nantes), l’Arabie Saoudite, le Koweït, Dubaï, le sultanat d’Oman, le Maroc ou encore l’Algérie. Cette implication étrangère forte pose notamment des problèmes de sécurité, alors que le radicalisme islamique a frappé plusieurs fois au cœur de l’Europe, à Paris en novembre et tout dernièrement à Bruxelles. Les liens entre monarchies du Golfe et groupes radicaux, notamment l’Etat Islamique, sont en effet un secret de Polichinelle.
Une centaine de mosquées clandestines au moins en France
Aux chiffres des mosquées officielles en activité et en construction, il faut cependant ajouter un certain nombre de mosquées clandestines, qui seraient au moins une centaine sur le territoire français. Selon une note des services de renseignement consultée par RTL début 2015, il y aurait 25 salles de prière radicales en Ile-de-France, 22 en région lyonnaise et 13 dans la seule ville de Marseille. Une bonne partie d’entre elles sont proches de mouvances radicales comme le salafisme et jouent un rôle assez important dans la radicalisation de jeunes (ou moins jeunes) par des imams ou des prêcheurs souvent situés en marge des institutions officielles et peu ou pas reconnus. Le phénomène n’est pas propre à la France : le seul quartier belge de Molenbeek, pépinière de djihadistes et base arrière du réseau qui a organisé les attentats de novembre à Paris et de mars à Bruxelles, en compte plus d’une vingtaine.
Suite aux attentats de novembre, trois mosquées clandestines ont été fermées à Lagny sur Marne (77), Gennevilliers (92) et près de Lyon à Vénissieux (69). Si la mosquée de Gennevilliers, déradicalisée, a rouvert début février 2016, celle de Lagny, flanquée d’une école coranique clandestine où de jeunes enfants étaient endoctrinés avec notamment des chants religieux à la gloire des martyrs du djihad, n’est pas près de rouvrir. La mosquée de Vénissieux, située dans un local non conforme aux normes de sécurité, a quant à elle été rasée.
D’autres mosquées clandestines apparaissent au hasard de la presse. Ainsi, le quartier (très) sensible de la Paillade à Montpellier en compte deux, qui ont été récemment perquisitionnées, non sans mal, par des policiers. Une autre mosquée clandestine se trouvait… à l’intérieur de la prison de Saint-Martin de Ré. A Alès, la salle de prière est non seulement clandestine, mais elle abrite aussi sa propre radio. A Bollène, une mosquée clandestine a été ouverte par une partie des musulmans qui contestaient la radicalisation de la mosquée officielle. A Toulouse, ce sont des troubles de voisinage qui ont fait découvrir au public l’existence d’une très discrète mosquée située quartier Arnaud Bernard. Et même la Corse n’est pas épargnée : la mosquée qui s’est retrouvée au cœur des troubles à Ajaccio n’était en réalité, comme nous l’avions révélé alors, qu’un local associatif appartenant à une association culturelle aménagé clandestinement en lieu de prière.
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