Témoignage, dans le Figarovox, de Xavier Denamur, restaurateur militant contre la malbouffe, auteur de Si on se mettait enfin à table? (éd. Calmann-Lévy).
A peine le seuil passé, vous tombez nez à nez avec une montagne de sacs de pommes de terre Innovator de la marque Terroir d’origine en provenance de Hollande. Ayant entendu que ce nouvel acteur de la restauration rapide se fournissait localement, je suis tout de suite rassuré en me rappelant que vu des USA, acheter local signifie se fournir en Europe.
Une chose est certaine si le personnel est sympa, normal me direz vous, il vient de commercer, le résultat dans le sac en papier kraft et le gobelet est gras, salé et surtout sucré, loin d’être à la hauteur de la communication maison où tout serait réalisé sur place avec des produits frais.
Ayant prétexté une allergie à certains stabilisants, conservateurs et autres joyeusetés industrielles qui inondent la malbouffe, on m’a amené le «guide des ingredients» Five Guys. Et bien alors que la personne à la caisse m’a garanti mon «milkshake fait maison», à 6€50 on pouvait l’espérer, le responsable du site va venir gentiment me le rembourser. Il est vrai que l’agent de conservation E 202 de la vanille ou l’émulsifiant mono- et diglycérides d’acide gras (E 471) ou l’agent de propulsion oxyde nitreux E492 de la crème fouettée faisaient plus usine que «fait maison» et risquaient de me faire mourir d’un hypothétique œdème de Quincke.(…)
Si les frites sont visiblement fraîches puisque les sacs de pommes de terre trônent à l’entrée avec des cacahouètes hyper salées en libre service, elles sont surtout hyper grasses, plutôt molles et cerise sur bide, elles sont plongées dans de l’huile de friture d’arachide raffinée avec fameux anti-moussant E900 ou diméthypolysiloxanne, un additif classé possiblement cancérigène par l’Association pour la Recherche Thérapeutique Anti-Cancéreuse (ARTAC).
Quand le manager m’a appris que la viande hachée «premier choix» fraîche venait d’Irlande, j’aurais souhaité qu’il me communique le pourcentage de matières grasses, m’explique comment elle est conditionnée afin de pouvoir l’utiliser à plus 24h sans être sous atmosphère contrôlée et pourquoi on ne peut pas obtenir saignant son steak. Quand il m’a dit que c’était comme cela que la viande était la meilleure, que c’était la politique de la maison, je me suis souvenu de la séquence du film Fast food nation où Bruce Willis explique pourquoi il faut bien cuire la viande (Bruce Willis «Shit in the meat , Just Cook It» à partir de 8’33»).
A ce prix, on trouve dans Paris des bistrots qui servent un menu avec des produits frais qui ont du goût sans ajout de sucre, de sel et de matières grasses traficotées.
Après une bonne dizaine de minutes à essayer de me convaincre de la qualité premium de ses produits, le manager a fini par me renvoyer vers la directrice de clientèle chez Le Public Système PR en charge de la communication du groupe. Cette dernière encore moins au parfum de la réalité des arrières cuisines de Five Guys m’a servi au téléphone le discours prémâché régurgité sans état d’âme par la plupart des médias. Quand elle m’a raconté que tous les légumes étaient découpés dans la cuisine chaque matin et que les champignons frais étaient livrés par un fournisseur de Rungis, ayant le «guide des ingrédients» Five Guys sous les yeux, elle a failli me faire tomber de ma chaise. (…)
Je recommande à Michelle Obama de dire à son mec d’arrêter de faire de la pub pour cette marque de fast-food.
Pour 19€ , après une heure d’attente évitée, on m’a servi en 5 minutes dans un sac en papier kraft: une portion de frites molles, un hamburger au pain mou composé de 2 steaks hachés de 65 g environ chacun hyper cuits et pas juteux du tout, d’une tranche de tomate insipide, de 5 feuillettes de salade iceberg, de quelques lamelles de champignons en boîte et d’une sauce sucrée-salée Heinz blindée de sirop de maïs et un milkshake assemblé sur place que l’on me remboursera. (…)
Pour la santé des Américains, je recommande à Michelle Obama de dire à son mec d’arrêter de faire de la pub pour cette marque de fast-food qui participe autant que les autres à la dégradation de la santé des consommateurs et l’environnement.