Par Alain Sanders
On nous dit que c’est la première exposition de cette importance consacrée aux Amérindiens en France. Il ne faut pourtant pas oublier, en 1699, la première exposition de l’Académie royale de peinture et de sculpture du Louvre avec une robe peinte – on la voit d’ailleurs au musée du quai Branly – d’un artiste anonyme inoka (Illinois) de la haute vallée du Mississippi. En 1845, Louis-Philippe avait reçu George Catlin, le peintre des Indiens, et un groupe de danseurs Iowas aux Tuileries. Louis-Philippe fut si fort impressionné par leur prestation qu’il commanda à Catlin une série de toiles (elles sont aussi au musée du quai Branly). Et il ne faut pas oublier Buffalo Bill et son Wild West Show qui se produisit en France à la fin du XIXe siècle et au début du XXe.
Il n’en reste pas moins que cette exposition, « Indiens des Plaines », est un événement qui mérite le déplacement : 133 objets et œuvres d’art reprennent, dans leur continuité, les traditions esthétiques de ces tribus des plaines du XVIe au XXe siècles.
Quand on dit, de façon un peu abrupte, « Indiens des Plaines », on passe un peu vite sur le fait que ces plaines – des provinces canadiennes du Saskatchewan jusqu’au Texas et du bassin du Mississippi jusqu’aux Rocheuses – ont regroupé des peuples d’origines très diverses. Des semi-nomades qui vivaient dans des tepees, mais aussi des sédentaires qui pratiquaient la cueillette, la pêche, la chasse et, déjà, une forme d’agriculture.
C’est l’introduction par les Espagnols du cheval, que les Indiens adoptèrent et magnifièrent très intelligemment, qui généralisera le nomadisme. A partir du XVIIIe siècle, les Indiens seront identifiés comme des cavaliers insurpassables et de redoutables chasseurs de bisons. Ce qui, là encore, est un peu réducteur.
L’exposition se décline en sept parties : 1. Le renouveau artistique dans la vie contemporaine (1965-2014). 2. Communautés et diaspora (1910-1965). 3. Peuples anciens, pré-contact. 4. La vie dans les Grandes Plaines (1700-1820). 5. L’épanouissement d’une culture (1828-1860). 6. La mort du bison (1860-1880). 7. Dans les vestiges des terres ancestrales (1880-1910).
On ne peut évoquer la geste des Indiens sans tenir compte des visions stéréotypées véhiculées par le cinéma hollywoodien. Dans les années vingt, sur 1 600 westerns, plus de 150 proposent des personnages de Peaux-Rouges. A partir de 1930, la tendance s’accentue avec les œuvres de Cecil B. De Mille, John Ford, William A. Wellman, Raoul Walsh, etc. L’exposition intègre donc une salle de cinéma dont la programmation propose des extraits de films (inutile de vous dire que l’on n’échappe pas toujours au politiquement correct ; l’indianisme, soit, l’indiânerie, non !).
Le visiteur peut se documenter sur les faits marquants de l’histoire des Indiens des Plaines grâce à des cartes géographiques, des graphiques, des textes et des éléments iconographiques bien conçus. A quoi s’ajoutent quelques ensembles thématiques : l’expédition de Lewis et Clark (1804-1806) ; les Seigneurs des Plaines ; politique des traités et conflits armés ; résilience spirituelle et culturelle.
Une belle réussite à mettre au crédit du commissaire de l’exposition, Gaylord Terrence, Senior Curator, Département de l’Art des Indiens du Nelson-Atkins Museum of Arts de Kansas City.
• Musée du quai Branly, Paris. Jusqu’au 20 juillet.