Gérald Darmanin annonce triomphalement la fin de la déclaration de revenus pour 2020… pour 5 millions de foyers fiscaux. Sur près de 38 millions de foyers fiscaux, c’est déjà peu. En fait, qui cela concerne-t-il ? Les salariés et retraités qui ne perçoivent rien d’autre que leur salaire ou pension, n’ont aucun avantage fiscal et n’ont connu aucun événement familial durant l’année. Autrement dit, seuls seront concernés les contribuables qui, de toute manière, n’avait déjà plus rien à faire depuis la déclaration pré-remplie…
Ceux qui perçoivent des dividendes devront toujours la remplir pour déduire les frais de garde. Les titulaires de revenus fonciers y seront aussi tenus au vu de la complexité des informations à fournir. En cas de revenus financiers, il faudra pouvoir récupérer les acomptes versés par la banque si on n’est pas imposable. Enfin, les crédits d’impôt et réductions d’impôt devront toujours être mentionnés, qu’il s’agisse d’une femme de ménage, d’un enfant au collège ou de toute opération de défiscalisation. Sans oublier toutes les charges à déduire du revenu global, aussi bien les cotisations de retraite que les pensions alimentaires ou encore les abattements propres aux personnes âgées.
Quant aux simples salariés, encore faudra-t-il qu’il n’opte pas pour les frais réels ou ne bénéficient pas d’une déduction spécifique comme les journalistes ou les artistes.
Bien entendu, les professions indépendantes, agriculteurs, commerçants et autres sont de toute manière exclues du dispositif puisque leurs revenus ne sont pas déclarés au fisc par un tiers…
La disparition de la déclaration de revenus relève donc presque de la « fake news » et risque de devenir un attrape-nigaud pour ceux qui prendront l’habitude de ne plus déclarer de revenus. Que ce soit le jeune parent qui oubliera de déclarer une naissance ou le retraité qui passera à côté de sa demi-part d’ancien combattant lorsqu’il atteindra 75 ans… Quant à ceux qui ne déclareront plus de bonne foi alors qu’ils auraient dû payer plus, comment le fisc les traitera-t-il ?
Le ministre met la charrue avant les bœufs. La vraie bonne nouvelle serait une réforme et une simplification en profondeur de l’impôt sur le revenu, avec un taux raisonnable rendant inutile toute défiscalisation et cette fois-ci automatique la disparition de la déclaration de revenus.
Mais nous n’en sommes pas encore là. La seule information ressortant de cette nouvelle est que si Bercy se sent capable de ne plus réclamer de déclaration de revenus, cela révèle l’importance des informations qu’il détient sur chacun d’entre nous, contribuable.
Olivier Bertaux, expert fiscal (Contribuables Associés