Dans quel état ils ont mis la chanson française ! A l’approche de la festivité convenue et insipide que constitue le rendez-vous annuel des Victoires de la musique, les critiques pleuvent, la chanson française n’est plus que l’ombre d’elle-même. Où sont les Brassens, les Brel, Piaf ou encore Mireille Mathieu ?
Il est toujours facile de s’en prendre aux artistes actuels, confrontés à la recherche d’un public, en les comparant aux gloires passées, voire disparues. Force est néanmoins de constater que tel un vulgaire produit de consommation, la chanson s’est délocalisée. Concurrencée par le jazz après la Grande Guerre et surtout par le rock au milieu des années soixante, la chanson française a été submergée par les standards anglo-saxons. Il en subsiste quelques chanteurs anémiés à l’engagement aussi lugubre qu’une primaire du PS. La chanson doit porter au rêve, elle a voulu miser sur l’économique mais ne rapporte plus. La dynamique est passée ailleurs, dans le rap par exemple. Aujourd’hui, on n’entend plus que des productions anglo-saxonnes. Comme celles des chanteuses étasuniennes qui se sont récemment déchaînées lors de l’investiture de Trump car le nouveau président des Etats-Unis donnerait « une image dégradante de la femme ». Sauf qu’avec leurs tenues et leurs postures, il y a longtemps que les Madonna, Lady Gaga, Miley Cyrus et autres sont passées au-delà de la dégradation…
Et tout fout le camp, même le rock. Le président de la France n’ayant rien de mieux à faire, il s’est invité à la soirée de lancement d’un magazine de rock. Une publication dirigée par un ancien du PS reconverti dans la presse du troisième âge. Le président a même déclaré sans rire : « J’ai connu Luc sur la question des maisons de retraite. C’est d’ailleurs lui qui m’a fait élire en 2012 ! »
La Mairie de Paris a décidé de relancer ses kiosques à musique. Erigées du temps de la musique vivante, du temps où il existait 7 500 orchestres de plein air en France, ces formations ont refondé l’identité musicale du pays détruite par la Révolution. Belle initiative, la musique est l’expression des liens collectifs qui unissent les communautés. La Belle Epoque est aussi celle d’une musique dont les compositeurs, les orchestres et les instruments font rayonner la culture française dans le monde entier. La musique que l’on aimerait entendre à Paris.
Revenant sur la musique du Grand Siècle, le label Ricercar propose un coffret de huit CD à caractère didactique. Chaque disque est consacré à un des domaines particuliers de la musique française quand elle concurrençait avec talent la musique italienne. On y croise donc les grands compositeurs du temps avec les meilleurs interprètes actuels. Le faste de la cour, l’intimité des salons et le recueillement des chapelles font revivre l’ambiance musicale de cette époque (La musique au temps de Louis XIV, Ricercar RIC 108, huit CD). Pour rester dans les mêmes répertoires, le label Alpha vient de rassembler dans un coffret de dix CD des enregistrements tirés de son catalogue. L’ensemble est cohérent, les interprètes remarquables, le tout à un prix très attractif (Splendeurs de Versailles, alpha, dix CD, 2016).
Thierry Bouzard – Présent