Grégoire III Laham est le patriarche grec-melkite catholique d’Antioche et de tout l’Orient, d’Alexandrie et de Jérusalem. Cette titulature exprime à elle seule la complexité et « l’exotisme » des chrétientés orientales aux yeux des chrétiens occidentaux. L’un des intérêts de cet entretien réalisé par notre experte consœur Charlotte d’Ornellas est de nous guider dans cette complexité et de nous faire toucher du doigt les réalités des rapports entre chrétiens et musulmans dans cette partie du monde bouleversée.
Conflit israélo-palestinien, guerre en Syrie, lutte contre l’Etat islamique : dans ces questions où les religions s’imbriquent et où la géopolitique s’embrouille, il est important d’écouter ce qu’ont à nous dire les chrétiens d’Orient, et spécialement un dignitaire religieux né en Syrie pour qui les vingt-six années passées en Palestine ont été « les plus belles » de son sacerdoce (p.31).
Le patriarche ne croit ni au pacifisme (p.50) ni au dialogue interreligieux : le dialogue est stérile et sans conséquence sur la vie alors qu’« il existe des traditions qui comprennent la coexistence entre chrétiens et musulmans, et qui sont beaucoup plus fortes et efficaces que n’importe quel dialogue » (p.88-89). Sur cette expérience multiséculaire s’appuie l’espérance de Grégoire III Laham en un avenir meilleur, humainement bien sûr mais surtout spirituellement : les chrétiens doivent rester en Orient parce qu’ils y sont chez eux mais la raison la plus haute de leur présence n’est-elle pas qu’ils sont « le levain dans la pâte » ?
Ce levain, Grégoire III Laham l’est. Il affirme sans relâche sa foi devant ses interlocuteurs juifs et musulmans, ce qui le fait respecter et lui fait dire qu’« il y a une plus grande difficulté à être chrétien en Europe qu’ici, même si les apparences laissent croire l’inverse ».
Grégoire III Laham, Ne nous laissez pas disparaître – Un cri au service de la paix. Entretien mené par Charlotte d’Ornellas. Artège, 130 pages, 12,90 euros.
Samuel Martin – Présent