Dans son nouveau livre, Yonnick Flot s’amuse à retracer l’histoire de Randolph Hearst, Gaston Gallimard ou encore Gérard Lebovici.
Deux puissants Américains ouvrent le défilé: William Randolph Hearst, le Citizen Kane de Welles, et Joseph Kennedy, patriarche du clan. L’implacable et richissime patron de presse viendra au cinéma par amour pour la charmante actrice Marion Davies, dont il voulait assurer la carrière mais qu’il étouffera à force de jalousie. Joe Kennedy, pour qui le cinéma est d’abord un commerce comme un autre, aura affaire à plus forte partie: Gloria Swanson, c’est à la fois le sex-appeal (l’expression naît à l’époque) et le dollar-appeal. Associés autant qu’amants, ils se lancent dans l’ambitieuse et désastreuse production de Queen Kelly d’Erich von Stroheim. Deux monstres sacrés, un homme de l’ombre et de l’argent mafieux, voilà une aventure.
Entre littérature et cinéma
C’est une femme encore qui attire Gaston Gallimard vers le cinéma: pour les grâces de Valentine Tessier, l’éditeur se fera producteur, ce qui nous vaut un récit un peu coquin (le tournage de Madame Bovary de Jean Renoir), mais aussi une judicieuse analyse de la liaison entre littérature et cinéma qui se noue alors – sait-on que la «novellisation» date de là?
Il y a du rose et du noir. Le rose est l’apanage de Marcel Dassault: le cinéma est le «rosebud» de l’avionneur qui ose, jours sombres passés et fortune faite, célébrer «l’actualité heureuse» et la comédie bon enfant, au grand dam de la critique intello, mais avec de beaux succès populaires comme La Boum. À l’opposé, l’énigmatique figure de Gérard Lebovici, assassiné dans un parking en 1984, nous entraîne dans un film noir, à l’intrigue tourmentée et irrésolue.
Avec Charles et Marie-Laure de Noailles, on plonge dans le Paris des années 1930 et du surréalisme, avec Alfred Greven dans celui de l’Occupation. C’est beaucoup d’histoire et d’histoires, savoureusement contées.
«La Vie tumultueuse des producteurs», de Yonnick Flot, Éditions Séguier, 21 €.
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