Officiellement interdits d’exercer depuis une loi datant de 1941, les herboristes français tentent de faire reconnaître leur profession. Lors de leur dernier congrès, ils ont créé une Fédération des écoles d’herboristerie, la première étape, espèrent-ils, vers la création d’un diplôme qui réhabiliterait leur spécialité.
Communément acceptée et pratiquée sur d’autres continents (Afrique, Asie), la médecine par les plantes n’a pas pignon sur rue en Europe et particulièrement en France où elle est très strictement encadrée et réglementée. Il en va de même pour le métier d’herboriste, lequel n’a plus cours légalement depuis précisément le 11 septembre 1941, date à laquelle le gouvernement de Vichy supprima cette profession dans sa Loi sur l’exercice de la médecine pour ne plus accorder qu’aux seuls pharmaciens le monopole de la vente et du conseil en matière de plantes médicinales.
Le 5 mai 1945, le Conseil national de la résistance a créé l’Ordre national des pharmaciens, lesquels n’ont pas, depuis, abandonné leurs prérogatives en la matière, un monopole qui écarte les herboristes. « En France, les pharmaciens veulent garder un monopole dont ils ne se servent pas », résume dans un entretien accordé à l’Agence France-Presse, Augustin de Livois, le président de l’Institut pour la protection de la santé naturelle (IPSN), un organisme créé en 2011 pour protester contre une directive européenne restreignant la liberté de commercialisation des plantes médicinales.
Le 1er septembre 1945, une ordonnance a bien autorisé les herboristes diplômés avant 1941 à exercer de nouveau mais, au fil du temps, ils se sont évidemment raréfiés pour finalement disparaître. La situation paraît aujourd’hui paradoxale : à l’heure où de plus en plus de Français se tournent vers les médecines naturelles, il leur est souvent difficile de trouver les produits qu’ils recherchent et qui leur feraient du bien. « Le problème, c’est le monopole des pharmaciens.
Face à la demande croissante du public, les herboristes ont décidé de s’organiser. Lors de leur dernier congrès qui s’est tenu à Lyon, ils ont fondé la Fédération française des écoles d’herboristerie qui regroupe les six principaux établissements du territoire. Objectif : la création et l’homologation d’un diplôme, comme c’est le cas en Belgique depuis 1978. En juillet 2011, le sénateur du Finistère Jean-Luc Fichet avait bien déposé un projet de loi qui rétablissait le diplôme et obligeait la profession à suivre des règles de sécurité draconiennes en matière d’approvisionnement. Son projet est néanmoins resté lettre morte, du moins pour l’instant.
Pour l’heure, c’est donc encore le flou total. Sur Paris intra-muros par exemple, il y a bien six herboristeries répertoriées. Elles sont tenues par des diplômés en pharmacie qui se sont passionnés pour la discipline. Mais leur diplôme ne suffit pas toujours au regard de la loi, ni aux yeux du Conseil de l’Ordre des pharmaciens. Ainsi, en avril 2013, Michel Pierre, qui exerce à l’herboristerie du Palais-Royal dans le 1er arrondissement, a été condamné à verser 2 000 euros de frais d’avocat par la cour d’appel de Paris pour exercice illégal de la profession de pharmacien. Reconnaissant que la législation était à l’heure actuelle inadaptée, le tribunal n’avait pas eu la main trop lourde…
Reste que c’est toujours un décret datant d’août 2008 qui régit le commerce des plantes médicinales en herboristerie. Ce décret n’autorise la vente que de 148 plantes, toutes jugées non nocives, « par des personnes autres que des pharmaciens », un éventail bien trop limité pour donner satisfaction aux herboristes.