« Liberté d’expression menacée. Où sont les Charlies pour protester ? »

Sur un ton à la fois ironique mais quelque peu inquiet, Libération (30 juillet) consacre un papier à l’affaire Fdesouche et à son co-animateur Pierre Sautarel, lequel a subi une garde à vue particulièrement musclée et zélée pour avoir simplement renvoyé au lien du site Panamza qui avait publié, en octobre 2014, un article mettant en cause trois personnalités de la gauche parisiano-libertaire dans une affaire de mœurs au Maroc.
L’une des personnalités, Pierre Bergé, a déposé plainte contre Fdesouche, mais encore, indique Libé, contre Le Libre Penseur, Délit d’im@ges, La Plume à gratter, Riposte laïque et, bien sûr, Panamza, dont le directeur de publication fut, lui aussi, convoqué au commissariat de police.
Le journal, ex-maoïste mais toujours post-soixante-huitard attardé, souligne que « dans la torpeur estivale, hormis le concert d’élus FN, peu de voix se sont élevées pour contester ou se féliciter de l’offensive contre Fdesouche ». C’est d’autant plus vrai que, comme le remarquait Robert Ménard, fondateur de Reporters sans frontières – ainsi que de votre site préféré -, dans un tweet malicieux : « Liberté d’expression menacée. Où sont les Charlies pour protester ? »
Et le quotidien de s’interroger plus avant – et non sans honnêteté, une fois n’est pas coutume – « sur l’impact qu’aurait eu un dépôt de plainte d’une personnalité de droite à l’encontre d’un site progressiste pour un simple relais de lien ». Pour l’avocat de Bergé, Emmanuel Pierrat, la cause est indiscutablement entendue. Pour lui, les sites poursuivis se « drapent dans la martyrologie », car si « c’est vrai qu’on pourrait aussi viser les particuliers, […] on [préfère] s’attaque[r] seulement aux gros relais que j’ai dans le collimateur depuis longtemps, des sites à dimension semi-professionnelle qui sont injurieux envers Pierre Bergé ». Dit autrement, Pierrat s’impliquant personnellement fait de la politique à travers son client qui, vraisemblablement, n’en demandait pas tant.
De tels propos en disent long sur le rétrécissement de la liberté d’expression en France. Qu’un soi-disant défenseur du droit comme Pierrat, donneur incontinent de leçons de morale sur les plateaux de télévision, assume se comporter comme un Fouquier-Tinville des atteintes à la liberté de la presse augure de funestes lendemains. Quant à Libération, qui paraît prendre soudainement conscience que, bientôt, ses journalistes pourraient eux-mêmes être attraits devant la XVIIe chambre pour le simple fait de relayer le lien ou la référence d’un média, c’est tout bonnement comique. Ces arroseurs arrosés qui n’ont eu de cesse d’encourager, tous azimuts, les censeurs pour les fachos, tout en appelant les mânes de Charlie, se trouvent pris au piège de leur schizophrénie idéologique.
Au surplus, que cette presse aussi peu lue que sous continuelle perfusion financière des groupes industrialo-publicitaires daigne s’intéresser à des sites honnis comme Fdesouche démontre, à tout le moins, que ces derniers ne laissent pas indifférents, quand ils ne sont pas tout simplement utilisés comme agence de presse, c’est-à-dire éhontément pillés, sans citer les sources ni versement de droits d’auteur.

Aristide Leucate – Boulevard Voltaire

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