L’ancien chef de l’État est arrivé tôt ce matin à Nanterre, à la brigade anticorruption de la police judiciaire, où il doit être entendu dans le cadre d’une affaire de trafic d’influence présumé.
Déjà, depuis lundi, les enquêteurs de l’office anticorruption de la PJ ont placé en garde à vue Me Thierry Herzog, le propre avocat de l’ex-président, mais aussi deux hauts magistrats, Gilbert Azibert, ex-avocat général à la chambre civile de la Cour de cassation, et Patrick Sassoust, qui tient les mêmes fonctions à la chambre criminelle de cette haute juridiction.
Au risque d’être accusés d’acharnement, les juges veulent à tout prix établir une sorte d’entente occulte qui aurait été passée l’an dernier entre tous ces personnages, dans le but d’entraver la justice dans le dossier du financement occulte présumé de sa campagne présidentielle de 2007 par le défunt dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Financement illicite à ce jour jamais établi. Et que même les écoutes téléphoniques au long cours sur Nicolas Sarkozy et ses plus proches n’ont pas permis d’étayer.
Inquisition judiciaire
Car pendant des mois, la justice a épié dans l’ombre l’ancien premier personnage de l’État, plusieurs ministres, leurs plus fidèles collaborateurs, et, incidemment, toute la famille politique de droite qui appelaient Nicolas Sarkozy et les siens. Le tout est allé alimenter des comptes rendus réguliers à l’exécutif en place. À commencer par Christiane Taubira, même si elle s’en est maladroitement défendue, le 12 mars, en exhibant lors d’une conférence de presse des documents qui prouvaient pourtant le contraire.
Le 26 février dernier, une information judiciaire a été ouverte par le parquet national financier créé par l’actuel gouvernement. Parallèlement au questionnement libyen, les enquêteurs ont été missionnés pour chercher à savoir si Nicolas Sarkozy avait été illicitement informé de son placement sur écoutes. Une enquête pour savoir si le suspect est au courant de l’enquête. La justice se mord-elle la queue?
Officiellement, les magistrats prétendent simplement vouloir démêler l’écheveau des relations entre des personnages qui prenaient beaucoup de précautions au téléphone. De leur côté, les intéressés pensaient se protéger d’une forme d’inquisition judiciaire. Avec ce fameux abonnement téléphonique souscrit au nom de Paul Bismuth par Me Herzog, qui pensait naïvement, par ce procédé, garantir un peu de confidentialité dans ses échanges avec son client.
Qu’apprend-on avec ces écoutes? Qu’Azibert a pensé rendre service en se renseignant, avant l’heure, sur la possible restitution par la justice des agendas de Nicolas Sarkozy saisis dans le cadre de l’affaire Bettencourt, où l’ancien chef de l’État fut totalement blanchi. Son collègue Patrick Sassoust est-il l’homme qui le renseignait? Si tel est le cas, son pouvoir d’influence n’a pas empêché la justice d’ordonner la conservation des carnets de Sarkozy.