Il ne me semble pas inutile de revenir sur la réunion du Conseil National de Debout la France qui a contribué à la décision historique de Nicolas Dupont-Aignan ; en effet ceci détermine l’avenir du mouvement mais aussi la nature de l’opposition future à E. Macron si l’incontestable basculement de l’opinion publique ne s’opère pas assez rapidement.
Nous étions quatre-vingt, qui donnaient le cœur avant le temps dans une trop petite salle, certains assis par terre, beaucoup venus précipitamment, la nuit, de provinces lointaines ; par les hautes fenêtres ceintes de boiseries centenaires, témoins parlant de l’art français, nous apercevions, droits et majestueux, les portails de L’Assemblée nationale pavoisés de notre bannière tricolore ; tous pénétrés de l’amour de France, conscients que nous participions à une parcelle de l’Histoire.
Les discussions furent parfois vives, mais la flamme patriotique de tous permit d’éviter les mots brisants ou exclusifs.
Nicolas Dupont-Aignan parla peu, en homme d’État responsable, froid et tenace, mais à chacune de ses interventions l’homme sensible, droit, empreint d’un humanisme serein, perçait, entraînant les indécis. Certes la tourmente avait atténué un peu son extraordinaire énergie, la fatigue des dernières semaines et la douleur digne, montraient leurs crocs mais la détermination demeurait entière ; l’aquilin triompha : main de fer dans un gant de velours, cet homme révéla l’étoffe d’un chef.
Cinq options se présentaient à lui : la première, un ralliement à Macron ne fut même pas exposé, restaient le ni-ni, l’exposition d’un choix personnel et non partagé par DLF d’appel à voter pour Marine Le Pen, le ralliement avec armes et bagages à cette dernière et l’accord de parti à parti, de responsable à responsable, d’égal à égal.
On dissipa en quelques mots la tentation de la fusion : aucun sens intellectuel, aucun intérêt mutuel, aucun poids politique nouveau.
Nous étions une poignée identifiés comme ceux qui croyaient à l’aventure, au moment historique, à la croisée des chemins ; notre premier objectif fut d’éliminer l’option d’un appel personnel de NDA n’engageant pas le mouvement, l’argument de l’ambiguïté, du flou d’une décision qui à la fois avait les désavantages du ni-ni et aucun des avantages du rapprochement fut déterminant ; l’heure était à la clarté, ce fut déterminant par la suite.
Bruno Dienot, du Gers, entama les débats, il parla d’un train qui passe, du dernier, celui qu’il ne faut pas louper ; cette métaphore fut souvent reprise, parfois avec l’idée que nous allions monter dans un train dont nous n’étions ni les conducteurs, ni les navigateurs.
Premier à parler, il donna le ton des quatre heures de discussion ; il indiqua avoir consulté sa fédération, base et cadres, puis, sans ambages il prononça les mots impensables : je voterai et appellerai à voter pour Marine Le Pen.
Lors la réunion changea de nature ; il ne s’agissait plus seulement de donner un avis sur la décision à prendre par NDA mais bien que le mouvement, représenté par ses délégués, se détermine par lui-même.
En salve les partisans du ni-ni, parfois dépassés par une sorte d’archéo-gaullisme, exprimèrent essentiellement des arguments péri-politiques : le qu’en-dira-t-on y était en bonne place, montrant, ce qui fut relevé, une sociologie bourgeoise ; Debout la France rêvé comme un MDC de droite sorte de club de réflexion… d’illusions.
Souvent des tensions familiales furent évoquées en cas de rapprochement avec le Front National, les déchirements de l’époque de l’affaire Dreyfus furent cités, cela en dit long sur la responsabilité des médias dans le climat d’extrême violence du débat actuel ; NDA rappela que l’accord se faisait avec Marine Le Pen, candidate fidèle aux institutions voulues par De Gaulle, en allant à la rencontre du Peuple français.
Puis vînt une séquence où beaucoup de partisans du ni-ni avouèrent que, comme nombre d’adhérents de leur fédération, ils préféraient une expression neutre alors même qu’ils mettraient un bulletin « Marine Le Pen » dans l’urne ; cette schizophrénie fut dénoncé bruyamment.
Les habituels optimistes invétérés, aveugles aux réalités des rapports de forces politiques, se dirent persuadés que les législatives allaient consacrer la première place de DLF au sein de la droite et qu’un soutien à Marine Le Pen détruirait à jamais cette chance unique pour la France ; exaltés par leur propre discours certains ne juraient que par la certitude de « NDA président » en 2022.
La parole fut donnée à Dominique Jamet ; à l’évidence il comptait sur son éloquence tranquille pour engluer les hésitants, mais son verbe fut morne, il rappela sans brio les efforts fait pour construire un parti indépendant et libre, lequel allait perdre son superbe isolement protecteur en se jetant dans une mêlée perdue d’avance.
C’est à ce moment que je suis intervenu. Répondant au dernier argument des chevaliers blancs de la pureté confortable et inefficace, j’indiquai que « si quelques-uns s’en vont, combien arriveront ? Et ceux qui nous quitteront où iront-ils, combien de temps mettront-ils à comprendre que le choix du combat pour la France indépendante est forcement Gaulliste ; en cette heure cruciale un bulletin blanc, un défilement, c’est une voix de moins pour les souverainistes ». Rappelant mon engagement plus que décennal avec Nicolas, j’affirmais avoir toujours trouvé en lui une constante humanité apaisée et prolixe ; je suis certain que s’il avait le moindre doute moral concernant la personne ou la pensée de Marine Le Pen, jamais il n’aurait tenté le moindre rapprochement : ne pas avoir confiance en son jugement aujourd’hui c’est renier notre engagement depuis que nous soutenons son combat. Cet argument fut ensuite repris par plusieurs opposants inversant leur position et rejoignant le camp favorable à un accord.
Je poursuivis en soulignant que nous apportions à l’attelage la qualité de nos adhérents, de nos cadres, notre capacité à mettre en œuvre un programme auquel notre intelligence collective avait apporté toute sa cohérence ; enfin, je terminais par ces mots « Nicolas Premier ministre (*) sera aussi le garant du respect absolu de la morale publique, de l’intégrité des valeurs républicaines, de l’honneur de la France, sa démission signerait la mort politique de Marine Le Pen, il sera n’en doutons pas l’épée de Damoclès.»
Une tentative fut faite en mettant en exergue que deux vice-présidents, peut être trois avec François Morvan, quitteraient le mouvement, mais la salle avait basculé, notamment après l’exceptionnelle qualité de la prise de parole de Patrick Mignon.
Dans une seconde intervention, Dominique Jamet pensant prendre l’avantage parla de l’héritage de la fille, personne n’eu l’indélicatesse de lui rappeler son propre passé.
Nicolas Dupont-Aignan résuma sobrement le dilemme : Marine Le Pen ne peut gagner sans ce que nous représentons, je préfère perdre avec elle à 48% que de la voir, sans nous, échouer à quelques pour cents près.
Dans un dernier sursaut, presque trotskiste, Dominique Jamet évoqua un vote, seules trois mains, et rapidement deux seulement, se levèrent contre le choix majoritaire.
Dès lors, ce sont les conditions de l’accord et la nature de notre participation aux législatives qui furent les sujets des autres interventions. Mais, sur le fil, un nouvel enjeu se fit jour : le calendrier ; certains ni-ni essayèrent de faire différer l’annonce du bouleversement, afin, bien sûr, d’en atténuer le sens et l’effet.
Dans un discours vibrant, politique et chaleureux, bien loin de sa retenue habituelle, Jean-Philippe Tanguy conclut les prises de paroles, en faveur d’un vote avec et pour le Peuple de France manipulé sans cesse par un système, une clique, utilisant jusque la nausée la peur comme argument.
La séance fut levée, quelques groupes continuant d’échanger ; à la fin nous restâmes quelques uns, NDA toujours à l’écoute de ses soutiens eut encore la force de dire quelques mots de remerciement, de préciser, d’évoquer l’avenir puis, il se retira pour préparer son intervention historique.
Un peu plus tard, en direct sur BFMTV Bruno Dienot, respectant les consignes, répéta que le choix de Nicolas Dupont-Aignan, était historique, courageux et sage ; refusant de parler des législatives et de sa candidature, il rappela que le second tour de l’élection présidentielle sera celui opposant le mondialisme extrême et systémique contre la France.
Gérard Couvert – Riposte laïque