La résurrection du Christ

Une production américaine foncièrement chrétienne et fidèle au récit biblique des événements sortira en France le 4 mai prochain. Lors de la sortie du film La Résurrection du Christ (Risen) en Italie – où un centurion romain cherche le corps de Jésus tandis que court le bruit de sa résurrection – je pensais que le scénario laisserait le public dans l’incertitude quant à la réalité de la résurrection. J’ai été heureusement surpris de constater que ce film est foncièrement chrétien, et fidèle au récit biblique des événements qui suivirent la mort de Jésus.

Dans ma scène préférée, le centurion Clavius déboule dans le Cénacle pour arrêter les fidèles les plus proches, et voit Jésus parmi eux alors qu’il a lui-même observé de près le visage du Christ mort. Interloqué, fasciné, angoissé, il se laisse glisser au sol. J’ai ressenti les mêmes émotions, me suis posé la même questions : est-ce possible ? Est-ce vraiment Jésus ? Et c’est également ce qu’on dû ressentir les premiers à voir Jésus ressuscité. Les Écritures parlent d’ailleurs de cet état de confusion : « Ils se prosternèrent devant lui. Mais quelques uns eurent des doutes ». Puis lorsque Thomas touche les plaies de Jésus, les doutent s’évanouissent, pour Clavius comme pour les spectateurs.

J’apprécie particulièrement cette scène non seulement parce qu’elle bien construite, mais parce qu’elle me rappelle les débats théologiques en vogue dans les années 1970 et 1980, qui remettaient en question la réalité matérielle de la résurrection. Nombre d’universitaires suggéraient alors que ce que la Bible nomme résurrection n’est pas un phénomène objectif perceptible par un observateur extérieur, mais une manifestation subjective témoignant de l’amour des disciples pour leur Seigneur.

Le théologien belge Edward Schillebeeckx, par exemple, y voit la présence métaphorique du pardon : les disciples se sentent coupables de leur lâcheté ou de leur trahison mais ils pressentent que Jésus leur a pardonné ce qui, dans un sens, fait qu’il est toujours vivant. C’est pourquoi ils construisent le récit du tombeau vide et de la réapparition du Christ. Roger Haight, théologien jésuite très influent, y voit lui aussi une expression symbolique de la conviction qu’ont les disciples de la permanence de Jésus dans la sphère divine. Ainsi, enseigne Haight, nul besoin de croire à la réalité du tombeau vide ou de la réapparition du Seigneur pour avoir foi en la Résurrection. James Carrol reprend cette interprétation en la vulgarisant.

N.T. Wright, grand exégète anglais, réussit très bien à démonter ces balivernes. Tout d’abord, elles sont profondément étrangères à la culture hébraïque : lorsqu’un juif du premier siècle de notre ère parle de résurrection, il ne peut pas se référer à quelque manifestation désincarnée. Les catégories dualistes chères aux Grecs n’ont été introduites dans la pensée chrétienne que plus tardivement, par les Gnostiques. En outre, ces interprétations théologiques postconciliaires sont antihistoriques : selon Wright, il est pratiquement impossible d’expliquer l’essor du premier mouvement chrétien sans une réelle résurrection de Jésus d’entre les morts. Le seul Messie crédible, pour les Juifs du premier siècle, ne peut pas avoir été mis à mort par les ennemis d’Israël, puisque celui qu’ils attendent doit vaincre les ennemis de la nation. Pierre, Paul et les autres ne pouvaient défendre – au sacrifice de leur vie – un Messie crucifié que s’Il était ressuscité. Vous imaginez Paul déboulant à Athènes ou Éphèse pour proclamer qu’un homme mort lui avait donné la foi ou que quelques apôtres avaient reçu le pardon d’un criminel crucifié ? Dans le contexte de l’époque, personne ne l’aurait pris au sérieux.

La Résurrection du Christ apporte une réponse beaucoup plus sensée et convaincante au plan théologique, en montrant qu’un non-croyant présent dans le Cénacle alors que les disciples vivaient la résurrection de Jésus aurait lui aussi vu quelque chose. Il n’aurait surement pas compris ce qu’il voyait, mais son expérience n’en aurait pas été moins objective. Les interprétations subjectivantes ont quelque chose de trop lisse, de trop rassurant. A chaque page du Nouveau Testament, on sent qu’il est arrivé aux premier chrétiens quelque chose de tellement extraordinaire et inattendu qu’ils ont voulu le raconter au monde entier.

Très franchement, La Résurrection du Christ nous fait mieux ressentir la troublante réalité de la résurrection, sa nouveauté inouïe, que nombre d’ouvrages de théologie contemporaine.

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