Auteur de deux essais – La France face au mondialisme (2011) et Résistance et Tradition (2013) –, Jean-Yves Dufour nous revient cette fois avec un roman, L’Ombre au sommet (Bibracte éditions). Ce roman est le parcours d’un homme faisant face aux forces occultes qui manipulent les foules au sommet de la hiérarchie de l’Etat. Un voyage dans les rouages du « Système ».
— Pourquoi avoir choisi de traiter ce sujet sous forme de roman ?
— Les écrivains disent souvent qu’ils n’ont pas choisi leur sujet mais que celui-ci s’est imposé à eux. C’est ce qui m’est arrivé. Je lis peu de romans et je n’ai pas cherché à en écrire un. Mais pendant plusieurs semaines, début 2014, le scénario m’a trotté dans la tête et, après l’avoir couché sur le papier, je me suis dit que ça pouvait être intéressant de le développer et de m’en servir comme vecteur d’informations sur l’ingénierie sociale. L’histoire a très peu changé par rapport à cette idée initiale. Accessoirement, j’espère que la forme romanesque me permettra de toucher un public plus large.
— Comment définiriez-vous le Système ?
— Le Système est un groupe informel qui détourne le droit et la démocratie par tous les moyens (Etat, médias, entreprises, finance, sociétés discrètes ou secrètes…) pour préserver ses intérêts. Il est composé selon moi de prédateurs qui défendent leurs privilèges, ou d’idiots utiles qui se donnent bonne conscience et/ou souhaitent conserver un prestige social. Ce Système utilise actuellement l’idéologie mondialiste, notamment le multiculturalisme et le néolibéralisme.
— Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de complotisme ?
— Le titre et le contenu font bien évidemment penser à ce qu’on appelle maintenant le complotisme. C’est un sujet à la fois délicat et incontournable. Délicat parce que l’importance des réseaux occultes est souvent sous-estimée ou surestimée et qu’il convient de remettre les choses à leur place. Incontournable parce que les nouveaux moyens de communication créent de la paranoïa à ce sujet, alimentée par les romans, le cinéma et la télévision. Dans chaque histoire, il y a un complot, c’est ce qu’on appelle l’intrigue. La plupart des gens sont terrifiés par cette idée. Ils peuvent imaginer un complot fomenté contre eux (ce qui serait dérisoire) mais ils n’admettent pas que le pouvoir, politique, financier, commercial, soit lui aussi la proie de comploteurs. L’illusion démocratique et le culte de la transparence tentent de refréner ces « théories ». Les médias dominants lancent depuis quelques années une offensive contre ce qu’ils appellent le conspirationnisme, qui en réalité ne fait que dénoncer le nouvel ordre mondial, c’est-à-dire l’organisation mondialiste des entreprises transnationales et des institutions supranationales. La difficulté est de rester raisonnable, de ne pas voir la main occulte partout, de ne pas systématiquement chercher « à qui profite le crime ». Cela nécessite de faire un travail sérieux sur les réseaux de pouvoir et de contre-pouvoir, les intérêts convergents, les alliances ponctuelles…
— Quelles sont vos références pour étayer la thèse qui sous-tend votre roman ?
— Mon roman contient deux niveaux de lecture : l’histoire elle-même et une mine de références antimondialistes, notamment en sciences humaines et en métapolitique. J’ai mélangé des auteurs anciens et récents, célèbres et moins connus, chercheurs et vulgarisateurs, critiques et apologètes du mondialisme, ainsi que des journalistes et des scientifiques qui ont travaillé sur les questions de manipulation psychologique, de psychopédagogie, de psychologie sociale, de contrôle social, etc.
— Dans quelle mesure votre roman s’inscrit dans la continuité de vos deux premiers essais ?
— Dans La France face au mondialisme, je dressais l’historique du mondialisme, de ses principes à son application, notamment à travers l’exemple de l’Union européenne. Dans Résistance et Tradition, je précisais les moyens de défense intellectuelle et de résistance politique à cette idéologie mondialiste et sa mise en place. Dans L’Ombre au sommet, il s’agit de l’exemple d’un jeune couple qui résiste au Système – lui, en l’infiltrant, elle, en le combattant frontalement. Cela permet d’humaniser le combat, de le concrétiser, d’envisager différents scénarios, de diversifier les points de vue et de donner des arguments au lecteur à travers les nombreux dialogues, qui sont un excellent moyen de réflexion, comme l’avaient expérimenté Socrate et Platon.
Propos recueillis par Louis Lorphelin pour Présent