À l’approche des élections européennes, le président hongrois Viktor Orbán vient d’entrer en campagne. Tous les cabinets en conseil politique vous le diront : rien de mieux que de personnaliser sa communication. Voilà qui est fait : les affiches du Fidesz, son mouvement, arborent les têtes de George Soros, le philanthrope argenté qu’on sait, et de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne qu’on ne présente plus. Des têtes de Turc, dira-t-on ; ce qui est plus que parlant en cette terre connue pour avoir vaillamment résisté aux invasions ottomanes.
Les instituts de sondages semblent être de cet avis, qui promettent au parti d’Orbán une première place que personne ne semble plus pouvoir lui disputer. En revanche, plus complexes devraient être les rapports futurs avec le PPE (Parti populaire européen) de centre droit, dont le Fidesz demeure l’un des membres ; ce, avec des bonheurs divers, on s’en doute.
La preuve en est que son président, le Français Joseph Daul (LR), joue depuis longtemps un étrange pas de deux, tenant Viktor Orbán pour l’« enfant terrible du PPE », tout en lui reprochant ses attaques continuelles contre la Commission européenne en matière de politique migratoire. Ainsi, sur la page Facebook du gouvernement hongrois, est-il reproché à Bruxelles de vouloir « instaurer le quota de réinstallation obligatoire des migrants, affaiblir les droits des États membres à défendre leurs frontières, faciliter l’immigration au moyen d’un visa de migrant ».
La réponse de Joseph Daul ne s’est pas fait attendre : « J’aimerais rappeler au Premier ministre Orbán que les décisions à Bruxelles, y compris celles qui concernent la migration, sont prises collectivement par les gouvernements de l’UE et le Parlement européen, qui incluent tous deux des représentants hongrois. Au lieu de considérer Bruxelles comme un ennemi fantôme, la Hongrie doit réaliser qu’elle en fait partie. »
Parti comme c’est, il n’est donc pas certain que le Fidesz continue de siéger encore longtemps dans les rangs du PPE. D’ailleurs, avec la nouvelle donne électorale en Autriche et en Italie, sortir de l’actuelle ambiguïté serait sûrement profitable à toutes les parties en présence. Marine Le Pen ne demande que ça depuis des années.
Toujours à propos de cette campagne, on remarquera qu’un Jean-Claude Juncker, en 2015, un jour où, ayant probablement abusé du mélange eau plate et eau gazeuse, avait traité le président hongrois de « dictateur ». Il est un fait que l’un est élu et l’autre pas.
L’avantage de la légitimité démocratique, c’est aussi qu’elle peut éventuellement permettre de mettre en œuvre une véritable politique alternative, loin des cénacles technocratiques. La preuve en est que Viktor Orbán s’apprête à accueillir trois cents migrants vénézuéliens. Un geste qui ne semble pas avoir, pour le moment, rendu le sourire à tous les démocrates indignés de la Commission européenne.
Il est vrai que les nouveaux venus doivent justifier d’au moins un aïeul de nationalité hongroise. À en croire l’AFP, il s’agirait principalement de descendants de l’insurrection anticommuniste de Budapest, en 1956. À titre de rappel, quand la famine ravageait l’Éthiopie à la fin du siècle dernier, Israël avait pris sa part de misère en accueillant de nombreux Falachas éthiopiens, lesquels devaient, nonobstant la couleur de leur épiderme, justifier aussi de leur appartenance à la religion israélite.
Plutôt mes filles que mes cousines et mes cousines que mes voisines ? On a déjà entendu ça quelque part.
Nicolas Gauthier – Boulevard Voltaire