Belgique. Nouvelles de France a rencontré Filip Dewinter, l’homme fort du Vlaams Belang, député au Parlement flamand ainsi que conseiller municipal et chef de file des élus du Vlaams Belang à Anvers (Antwerpen). Le Vlaams Belang est un parti nationaliste flamand qui désire la fin de l’État belge et l’indépendance de la Flandre. Cette formation politique a obtenu 1/3 des voix au sein de la municipalité d’Anvers et 1/4 des voix en Flandre avant de subir la concurrence du parti national-centriste N-VA de Bart De Wever. Le transfert d’une partie importante des électeurs du Vlaams Belang vers la N-VA est la conséquence du « cordon sanitaire », une mesure anti-démocratique mise en place du plus bas au plus haut niveau de pouvoir par les partis politiques du système afin d’empêcher le Vlaams Belang de gouverner.
Lionel Baland : Le président du PVV, le néerlandais Geert Wilders, a rencontré Marine Le Pen à Paris le lundi 22 avril 2013 en vue de discuter de la possibilité de former à l’issue des élections européennes de 2014 un groupe ou une alliance de divers partis patriotiques européens. Geert Wilders a déclaré vouloir également rencontrer dans ce but des dirigeants du Vlaams Belang.
Filip Dewinter : J’ai déjà rencontré Geert Wilders à plusieurs reprises. Ce dernier, qui refusait jusqu’il y a peu tout rapprochement avec la plupart des partis nationalistes d’Europe, est désormais conscient du fait que ces formations politiques doivent travailler ensemble afin de s’opposer à l’Europe de Bruxelles, mercantile et mondialiste. J’espère que cette fois-ci, il n’y aura pas beaucoup de divergences, alors que cela a été le cas lors des accords qui ont eu lieu dans le passé au sein du Parlement européen entre diverses formations politiques patriotiques.
Lionel Baland : Quels partis voyez-vous au sein de cette association ?
Filip Dewinter : La Ligue du Nord (Italie), le FPÖ (Autriche), le Parti du Peuple danois (Danemark), les Démocrates suédois (Suède), le Vlaams Belang (Flandre – Belgique), le Front national (France), le PVV (Pays-Bas).
Lionel Baland : Et l’UKIP, le parti pour l’indépendance du Royaume-Uni ?
Filip Dewinter : Je ne pense pas qu’ils désireront venir avec nous.
Lionel Baland : La ville d’Anvers (Antwerpen), plus grande cité de Flandre, a été durant de nombreuses années un bastion du Vlaams Belang. Les autres partis politiques ont créé « un cordon sanitaire » autour du Vlaams Belang, qui consiste principalement en un refus d’alliances, afin de l’empêcher d’avoir accès à la gestion de municipalités, provinces, régions ou de l’État.
Lors des dernières élections municipales, en octobre 2012, une partie importante des électeurs du Vlaams Belang, tant à Anvers que dans l’ensemble de la Flandre, a déplacé son vote vers le parti national-centriste N-VA dirigé par Bart De Wever.
Filip Dewinter : La situation que nous connaissons avec la N-VA est la même que celle rencontrée lors des élections présidentielles française de 2007 par Jean-Marie Le Pen face à Nicolas Sarkozy. Les électeurs flamands vont s’apercevoir rapidement que, comme Nicolas Sarkozy, la N-VA n’apporte pas de solutions en matière de chômage, d’immigration, d’insécurité… Lorsque l’engouement pour le Vlaams Belang augmente, les partis du système mettent en place un concurrent au Vlaams Belang. Hier, c’était De Decker [un libéral de droite, ndLB] ou Van Rossem [anarchiste et malfrat, ndLB], aujourd’hui c’est Bart De Wever et son parti. Afin de survivre, le Vlaams Belang doit se maintenir entre 10 et 13 % des voix. La N-VA est un parti comme ceux du système. En 2004, la N-VA récoltait peu de voix et le Vlaams Belang 24 % [lors d’élections pour le Parlement de la Région flamande]. La cause de ce départ d’électeurs du Vlaams Belang vers la N-VA est le cordon sanitaire. Le Vlaams Belang existe depuis 35 ans et se maintien entre 10 et 15 %, c’est cela qui est important.
Lionel Baland : Oui, mais la différence entre Nicolas Sarkozy et Bart De Wever est que le premier a mis en avant des idées nationalistes qui ne sont pas les siennes afin de « siphonner » l’électorat du Front national, alors que Bart De Wever vient des milieux nationalistes flamands.
Filip Dewinter : Oui, Bart De Wever vient du même milieu. Ses parents ont même été des électeurs du Vlaams Belang. Si les deux partis sont nationalistes flamands, la N-VA est un parti nationaliste culturel et pas ethnique. Ce parti ne s’oppose pas au multiculturalisme et à l’islam. Il parle d’immigration mais ne lie pas le multiculturalisme et l’islam à l’immigration.
Le discours de la N-VA s’arrête là où commence celui du Vlaams Belang. Le Vlaams Belang a proposé à plusieurs reprises une alliance à la N-VA, notamment à Anvers et au sein des districts [quartiers, ndLB] d’Anvers à l’issue des élections municipales [d’octobre 2012, ndLB]. La N-VA a préféré une alliance avec les partis du système. La N-VA est l’alibi des partis traditionnels. Il faut rompre avec les partis traditionnels !
Lionel Baland : Que pense Filip Dewinter de la proposition du maire N-VA d’Anvers Bart De Wever d’instaurer une taxe de 250 euros pour les étrangers qui désirent habiter à Anvers ?
Filip Dewinter : Il s’agit d’une proposition spectaculaire, mais qui ne change rien. C’est symbolique, mais cela ne va pas arrêter l’immigration. C’est de la politique spectacle ! Il n’y aura pas un immigré de moins !
Lionel Baland : Que pensez-vous des positions de Bart De Wever à propos des structures de l’État belge ?
Filip Dewinter : Bart De Wever est confédéraliste. Le confédéralisme est le fédéralisme des cons. Le Vlaams Belang désire l’indépendance complète de la Flandre.
Lionel Baland : Depuis que Bart De Wever gouverne Anvers, qu’a-t-il réalisé ?
Filip Dewinter : Pas grand-chose. C’est la preuve qu’il est la marionnette de l’establishment politique.
Lionel Baland : Bart De Wever, grâce à sa stratégie, a pu faire entrer des membres de son parti au sein des exécutifs des municipalités, alors que le Vlaams Belang a été privé de tout accès à ces fonctions. Le parti de Bart De Wever a ainsi sorti, en prenant leur place, des exécutifs municipaux un certain nombre de représentants des partis du système.
Filip Dewinter : Cela ne sert à rien de remplacer des représentants du système par ceux d’un autre parti qui donne l’impression de vouloir changer les choses, mais est lui-même un parti du système. La N-VA est plus dangereuse, car elle trompe les électeurs nationalistes en leur faisant croire que voter N-VA, c’est voter nationaliste. Bart De Wever est un Philippe de Villiers flamand.
Lionel Baland : À Alost (Aalst), la N-VA gouverne la ville avec les socialistes et les sociaux-chrétiens. Le maire est membre de la N-VA, ainsi que quatre échevins [adjoints au maire, ndLB]. Deux de ceux-ci ont été actifs autrefois au sein du Vlaams Belang, notamment Karim Van Overmeire qui a joué un rôle important dans ce parti.
Filip Dewinter : Ils appliquent la partie des mesures symboliques prônées par le Vlaams Belang en 2006. Par exemple, la suppression des portraits du Roi et de la Reine et des drapeaux belges ou le fait que les panneaux de noms de rue doivent porter l’écusson flamand. La mise en pratique de ces mesures est positive, mais c’est symbolique et il faut aller plus loin. Ces décisions attirent l’attention des médias et cela donne l’impression d’un grand changement. Il faut d’autres mesures pour arrêter l’immigration.
Lionel Baland : En 2014, des élections régionales, nationales et européennes ont lieu en Belgique. Qua va faire la N-VA ?
Filip Dewinter : La N-VA va gagner les élections. Elle s’alliera ensuite aux sociaux-chrétiens et aux libéraux afin de gouverner la Flandre, alors qu’actuellement cette région est gouvernée par une coalition réunissant la N-VA, les sociaux-chrétiens et les socialistes.
Le cordon sanitaire a dérouté les électeurs. Ils ont changé de parti en passant du Vlaams Belang à la N-VA, mais ils n’ont pas changé d’idées. Pour le Vlaams Belang, c’est une victoire idéologique. Le Vlaams Belang est le fer de lance des idées nationalistes flamandes, il a pavé la route de la N-VA. L’électorat nationaliste flamand représente en Flandre entre 30 et 40 % des voix. Il faut un parti qui veut réellement changer les choses, un parti révolutionnaire. Le Vlaams Belang est le « bâton derrière la porte ».
Lionel Baland : Suite au fait qu’une partie importante des électeurs du Vlaams Belang est passée à la N-VA, le Vlaams Belang a changé de méthode. L’objectif est de faire tomber le cordon sanitaire.
Filip Dewinter : Le Vlaams Belang est victime du cordon sanitaire, parce qu’il est pour l’indépendance de la Flandre. Le Vlaams Belang a changé de stratégie afin de récupérer une partie des électeurs passés à la N-VA. Le Vlaams Belang met en avant le thème social et la lutte contre la délinquance pour attirer certains types d’électeurs qui ont choisi la N-VA.
Lionel Baland : Désirez-vous ajouter quelque chose à cet entretien ?
Filip Dewinter : Non.
Lionel Baland : Merci.
Filip Dewinter : Merci aussi.
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