Tribune libre de Robert Ménard*
Manuel Valls donne des gages à la gauche. En annonçant qu’il allait relancer les naturalisations — il veut assouplir les critères imposés par le gouvernement précédent —, le ministre de l’Intérieur semble bien décider à amadouer ses camarades socialistes effrayés par sa liberté de ton, ses prises de position « sécuritaires » (sur les Roms, le « contrôle au faciès »…) et sa cote sondagière, proprement stratosphérique : 75% des personnes interrogées ont une « bonne opinion » de lui, selon le dernier baromètre Paris-Match.
Mais au-delà de ces petits jeux politiciens, proposer de « redresser la courbe du nombre de naturalisations » — nombre qui a diminué de 116 000 en 2010 à 87 000 en 2011 — est proprement hallucinant.
M. Valls a beau multiplier les précautions oratoires — il ne faut pas « brader » la naturalisation, dit-il —, il n’en explique pas moins aux préfets qu’ils devront, par exemple, présumer « l’assimilation » des jeunes ayant effectué une grande partie de leur scolarité en France. Présumer ? Mais faut-il rappeler à notre ministre que 37% des jeunes d’origine étrangère ne se sentent pas français selon l’Institut national d‘études démographiques !
« On ne devient pas français en répondant à un QCM ! » a lancé Manuel Valls, faisant allusion au questionnaire sur l’histoire et la culture françaises, prévu dans la loi mais jamais appliquée. Peut-être. Encore que je ne vois pas très bien en quoi ce questionnaire serait « discriminatoire » pour reprendre le mot des organisations de défense des étrangers et des sans papiers.
« La France est une terre d’accueil » a conclu celui qui, devenu français à l’âge de 20 ans, est le parfait exemple de cette intégration à la française. Certes, mais la nationalité française doit se mériter, se gagner et même, parfois, se perdre. Manuel Valls le sait mais le dire est un crime de lèse-socialisme. La France ne peut être ouverte aux quatre vents. Les Français le disent chaque jour, en votant, en s’abstenant, en se querellant, en se taisant.
Ils veulent qu’on s’occupe d’eux d’abord. Et ils ont raison.
Un mot sur les cris d’orfraie d’un Éric Ciotti, secrétaire national de l’UMP à la sécurité, ou d’un Jean-François Copé. Ils prêteraient à sourire s’il ne s’agissait du devenir de notre pays. Qu’ont-ils fait quand ils étaient aux postes de commande au-delà des grands discours ? Les naturalisations ont été maintenues autour de 100 000 par an. C’est seulement à la veille de la présidentielle qu’ils ont enfin prêté l’oreille aux craintes des Français.
Ce que dit d’ailleurs M. Valls quand il confie n’avoir comme objectif que de « retrouver le rythme d’avant », c’est-à-dire celui des premières années du quinquennat de Nicolas Sarkozy !
*Robert Ménard est journaliste et fondateur de l’association Reporters sans frontières. Il vient de lancer le portail Boulevard Voltaire.
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