Cet événement est passé quasi-inaperçu en France, mais le score du Congrès de la Nouvelle Droite (Kongres Nowej Prawicy, ou KNP) a créé un séisme dans le monde politique polonais. En effet, pour la première fois, ce « petit » parti « loufoque », comme le qualifiait il n’y a pas si longtemps Olivier Bault sur Nouvelles de France, a atteint la barre des 5% nécessaires pour envoyer des députés à Strasbourg. Au total, ce parti totalise 7,02% des suffrages. 4 députés libéraux-conservateurs sceptiques sur l’Union Européenne actuelle siègeront au parlement du vieux continent.
En quoi ce parti se différencie des autres ? Tout d’abord, contrairement aux autres partis patriotiques européens (le FN en est le meilleur exemple), KNP est un parti hostile à tout socialisme et étatisme. Janusz Korwin-Mikke, la figure emblématique de ce parti, n’hésite pas à qualifier ses interlocuteurs des grands partis (Plateforme civique du Premier Ministre Tusk, Droit et Justice des Jumeaux Kaczynski…) de « voleurs » ou de « tricheurs ». Sa manière de débattre peut paraître sèche et arrogante, mais quand il parle, c’est pour toucher là où ça fait mal.
Concrètement, quel est le programme et la vision de ce parti ? Tout d’abord, les ténors de Nowa Prowica (les plus agés), n’ont généralement pas fait partie de Solidarnosc à l’époque communiste. Ces personnes étaient plus dans de petits partis, parfois clandestins, qui ne faisaient aucune concession au pouvoir communiste. KNP se définit avant tout comme un parti libéral-conservateur. Ses positions économiques peuvent être qualifiées même de libertariennes (suppression de la retraite par répartition, baisse drastique des impôts, réduction du nombre des parlementaires à son strict minimum, possibilité de souscrire à une assurance santé ou non…). Du point de vue moral, KNP souhaite que l’État n’effectue aucune ingérence dans la vie familiale. En garantissant le respect de la famille, le parti de Korwin-Mikke souhaite empêcher toute revendication « progressiste » sur ces thèmes.
Les résultats des élections de dimanche sont intéressants à analyser : En effet, on découvre que parmi les 18-25 ans, Nowa Prawica a réalisé un score exceptionnel. C’est le même phénomène que Ron Paul aux États-Unis : les jeunes en ont marre du socialisme, qu’il soit souverainiste ou internationaliste. En outre, Nowa Prawica a réussi à siphonner de nombreuses voix électorales à Twoj Ruch (Ton Mouvement), un parti anticlérical qui avait réalisé 10% aux dernières élections législatives. En parlant avec de nombreux jeunes polonais, j’ai pu réaliser à quel point nombre de jeunes avaient voté pour Twoj Ruch juste par protestation antisystème. Ils ont dû réaliser à ce moment que la voie libérale est bien plus cohérente.
Pourquoi souligner autant le score élevé de KNP ? Car ce parti propose une offre politique radicalement différente. Ayant abordé rapidement le programme économique et sociétal de ce parti, nous pouvons nous attarder un peu sur la politique étrangère que propose KNP. En Pologne, il règne en ce moment un climat anti-Russes, ce qui peut se comprendre. Les articles engagés d’Olivier Bault vous l’ont montré à travers Gazeta Polska, organe de presse officieuse des Kaczynski. KNP propose de calmer le jeu, de retrouver sa souveraineté, de se respecter soi-même, et ensuite, commencer à négocier avec la Russie pour développer le libre-échange. Il faut bien comprendre que ce parti a pour but de favoriser le libre-échange entre tous les pays : c’est la garantie de vivre longtemps en paix avec son voisin. Durant une récente interview, Janusz Korwin Mikke s’est même amusé à dire qu’il y a 20 ans on le traitait d’anti-Russes, et qu’aujourd’hui, on le traite d’anti-Américains (alors qu’il avait proposé lui-même que la Pologne intègre l’ALENA, marché de libre échange nord-américain).
Chez KNP, les discussions commencent concernant l’appartenance à un groupe au parlement Européen. Ce qui semble le plus probable c’est qu’ils s’allient avec le UKIP de Nigel Farage. En effet, ces deux partis ont en commun de vouloir créer une zone de libre échange en Europe mais avec des États souverains et sans bureaucratie européenne. Une alliance avec le FN discréditerait ce mouvement auprès des jeunes, qui ont plus soif de liberté que d’étatisme.
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