Elisabeth Bousquet, ou la victime passée sous silence

Hamida Djandoubi

Dernièrement, on a beaucoup parlé d’Hamida Djandoubi, le dernier condamné à mort de France, guillotiné à Marseille en septembre 1977. On s’est épanché de remords quant à la peine capitale, avec une description larmoyante de la longue attente du meurtrier dans sa salle d’exécution. La foule de détails avec laquelle la scène est racontée nous présente un condamné victime de la société, impuissant face à la machinerie étatique qui s’est mise en tête de broyer une vie humaine qui, après tout, valait la peine d’être vécue. L’article du Monde est à ce sujet tout à fait insistant, mettant en avant la fragilité de la vie d’un homme ordinaire face à la dureté d’une justice d’un “autre temps”. Il est évident que les deux courants qui s’opposent sur la peine de mort ont tous deux des arguments valables. La liberté est laissée à chacun de juger de la chose en son âme et conscience.

Toutefois, une chose tout à fait révoltante, que l’on soit pour ou contre la peine capitale, est le silence total concernant la victime des crimes à l’origine du destin d’Hamida Djandoubi. On n’y apprend pas même son nom, ce qui est un comble de mépris à l’égard de cette victime de la folie furieuse de cet assassin.

Cette femme, c’est Elisabeth Bousquet, une des nombreuses conquêtes du futur bourreau. Alors que ce dernier avait pour habitude de prostituer les filles qu’il contrôlait, Elisabeth refusa de céder aux menaces de son amant de l’époque. Hors de lui, il l’insulte, la bat et finit en prison.

Dès sa sortie, en juillet 1974, il l’enlève. Arrivé chez lui, il la jette à terre, la frappe, l’assomme et la viole. Comble de barbarie, il lui brûle les seins et le sexe avec le bout de sa cigarette. La femme gît au sol, et le tortionnaire l’asperge d’essence avant de tenter de l’enflammer. Voyant que cela ne prend pas, il emporte le corps de la malheureuse dans son cabanon, et l’y étrangle, sous les yeux de deux mineures qu’il prostituait.

Se focaliser sur l’assassin et son parcours, pour ensuite combattre la peine de mort, a eu pour effet un abandon mémoriel de la victime de la part de nos médias. On y défend maintenant le malfaisant, qu’on victimise au nom d’une idéologie droit de l’hommiste qui se contredit elle-même.

À quand un article du Monde en mémoire à la mort tragique d’Elisabeth Bousquet ? Où sont les revendications féministes qui habituellement fusent dans de telles situations ? Citoyens, Citoyennes, ne laissons pas la désinformation triompher au nom d’une idéologie immorale !

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51 Comments

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  • Charles Martel , 12 octobre 2013 @ 12 h 20 min

    Vous avez raison, mais la prison aujourd’hui tient plus du Club Med que du bagne. Les prisonniers sont nourris, logés habillés, et ont des loisirs et même, pour certains d’entre eux, des sorties. Voilà un régime qui n’est pas très dissuasif et qui n’incite pas à la retenue en matière de délinquance, le pire étant encore le système automatisé de remise de peine. Je pense que si la prison faisait vraiment peur, elle participerait à la dissuasion. C’est pourquoi on devrait rétablir le bagne et les travaux forcés. En effet, le coupable a déjà coûté à la société, et paradoxalement il va encore lui coûter en étant hébergé gratuitement… Cette dépense devrait plutôt aller aux victimes qu’aux coupables.

  • monhugo , 12 octobre 2013 @ 14 h 18 min

    Si quand Djandoubi commet son crime, la peine de mort n’existait déjà plus dans l’arsenal législatif français, cela aurait-il changé quelque chose à son niveau ? Au niveau de sa prise de conscience éventuelle de commettre l’irréparable ? L’aurait-il fait plus volontiers, sachant que la peine capitale ne pouvait lui être appliquée ? Non, bien sûr. Le crime a été commis, sans considération pour la peine à venir, dans ces termes-là : peine capitale, ou détention.
    Plus simplement dit, la peine de mort n’a jamais eu de “vertu” dissuasive. Ni sur Djandoubi, ni sur personne.
    Alors, qu’est-ce qui “justifie” la peine capitale ? L’horreur toute particulière du crime, sa multiplication (“tueurs en série”), la (ou les) victime(s) – enfants, personnes âgées, détenteurs de l’autorité publique… ? Mais si la peine capitale était rétablie, ce serait par principe, et pas que pour les assassins d’enfants innocents…. Ce type de raisonnement “sélectif” est donc impossible en droit.
    Ceux qui réclament son retour sont animés par la vengeance – genre loi de Lynch – collective et populaire. Vouloir le rétablissement de la peine de mort participe d’un intérêt pour la loi du Talion, dans sa version ultime : une vie pour une vie (voire des vies). Or, bien sûr, ceux qui réclament la peine capitale à nouveau ne voudraient (j’imagine) pas du Talion en version “douce” et ordinaire tel qu’il est appliqué dans certaines sociétés (couper la main du voleur par exemple..). Contradictoire….
    Il me semble que pas un des commentaires précédents n’a évoqué l’argument principal permettant de refuser la peine capitale – l’erreur judiciaire ! En dépit des progrès constants (et spectaculaires) des “experts”, le risque zéro n’existe pas en la matière. Convenez, au nom du simple bon sens, qu’il est impossible de “réparer”, si le guillotiné s’avère finalement innocent !
    La peine de mort est une réponse archaïque, fondée sur la vindicte collective, absolument sans effet dissuasif, et qui est la porte ouverte à l’iniquité insurmontable, en cas d’erreur ou de dysfonctionnement des institutions policière et judiciaire.
    En revanche, un Djandoubi, cela mérite de finir ses jours en prison. En travaillant, pour dédommager les parties civiles, mais aussi pour payer sa “pension” à l’administration pénitentiaire. Mais ceci est une autre question….

  • Hélène Richard-Favre , 12 octobre 2013 @ 17 h 21 min

    Cet article dont j’ai écrit plus haut qu’il était fort et offrait de quoi méditer, inspire en effet autant de pistes de réflexion que de prises de position quant à la réponse à apporter au mal.

    La peine de mort en a été une en France, ne l’est plus, tandis qu’elle le reste ailleurs de par le monde.

    Pour ce qui est du mal et de l’impunité qui l’accompagne, il y a aussi de quoi s’interroger…

    http://voix.blog.tdg.ch/archive/2013/10/12/temp-df8885791a964c059f5a266dff49ead5-248398.html

  • Charles Martel , 12 octobre 2013 @ 17 h 27 min

    Vous avez bien appris votre leçon, mais du coup vous confondez opinion et fait avéré. Pas plus que les opinions contraires votre opinion n’est infaillible. Elle est donc critiquable et opposable. Quant aux raisons de ceux qui prônent le retour de la peine de mort, vous ne les connaissez pas et leur faites donc un procès d’intention tout en leur crachant votre mépris. Je n’ai personnellement aucun respect pour ceux qui pensent que seule leur opinion est valable et qui ne font rien pour expliquer pourquoi. La peine de mort n’est pas une vengeance, elle a bien d’autres justifications et ce ne sont pas les individus qui la prononcent mais, depuis des millénaires, la justice au nom de la collectivité. De même, lorsqu’un soldat fait la guerre, il ne tue pas en son nom propre mais au nom de la collectivité qu’il défend et pour laquelle il agit. Vouloir prétendre le contraire est une insulte à ceux qui donnent leur vie pour ceux qu’ils aiment. On peut aussi dire que les adversaires de la peine de mort ont peut-être peur, inconsciemment, de se retrouver eux-même devant le bourreau un jour ou d’y retrouver leur propre enfant…

  • monhugo , 12 octobre 2013 @ 18 h 15 min

    Cher Monsieur, vous faites mine de croire que je suis une décérébrée gaucho. Vous devriez savoir, étant assez répandue en ces lieux, que la réalité est bien différente, me concernant. Je suis au contraire ce qui se fait de plus à droite – d’aucuns écriraient d”‘extrême-droite”, probablement. Mais j’ai une grande liberté de pensée, et sur certains sujets, ai des opinions très différentes du “mainstream” de ma famille politique. La question de la peine capitale fait partie de ces obiter dicta. Je maintiens ma position, à savoir que la peine capitale est une réponse absolument pas adaptée à la criminalité, et qui n’est recommandée qu’au nom de la plus pure démagogie – flatter les bas instincts du “bon peuple”, celui qui aime à hurler avec les loups; celui qui lynche si l’occasion lui en est donnée, comme à Madagascar – horrible affaire de “justice populaire” de Nosy-Be :
    http://www.linfo.re/Ocean-Indien-Faits-divers/556835-Lynchage-a-Nosy-Be-13-suspects-transferes-a-Tananarive
    Je constate que la circonstance selon laquelle des innocents peuvent être guillotinés vous indiffère, alors que c’est un argument imparable contre la peine de mort. Vous êtes probablement du genre : “tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les Siens !”.
    C’est vous, “Charles Martel” (qui méritez bien mal un tel alias) qui méprisez ceux qui ont un avis – même ultra fondé – qui n’est pas le vôtre.

  • Charles Martel , 12 octobre 2013 @ 19 h 26 min

    Je vois que ce n’est pas l’humilité qui vous étouffe, et qu’en plus vous insultez plutôt que d’argumenter ! En quoi les partisans de la peine de mort seraient-ils plus démagogiques que vous ? Vous n’expliquez rien et citez des anecdotes isolées et sans rapport pour justifier vos positions. Il s’agit là d’un débat de fond, pas d’une surenchère d’affirmations péremptoires où l’aveuglement le dispute à la bêtise. Quel avantage y a t-il pour tous à enfermer à vie un condamné ? La privation perpétuelle de liberté est-elle donc à ce point plus enviable que la privation de vie ? A qui doit-on ôter la vie ? Au tortionnaire ou, par voie de conséquence, à ses victimes si le tortionnaire récidive après avoir été relâché ? Comment se fait-il que la plupart des meurtres en France sont le fait de violeurs multi-récidivistes ? La vérité, c’est que vous mélangez – je l’ai déjà dit mais vous ne m’avez pas lu ou pas compris – l’attitude personnelle, qui doit être charitable envers son prochain, et la raison d’état. C’est pourquoi la peine de mort a été pratiquée à des époques et dans des pays éminemment civilisés – contrairement à la version officielle – dont le code moral était pourtant fondé sur le respect de la vie humaine, je veux parler des royaumes catholiques. Je suis moi-même fervent catholique et pratiquant, et pourtant je persiste dans ce que je viens de vous dire.

  • Anonyme , 14 octobre 2013 @ 5 h 30 min

    Et le risque de ne pas condamner un criminel bien réel ? Et celui, bien plus grave, de le relâcher au bout de 22 ans alors qu’il continue de constituer un danger pour la société ?

    Aux familles des victimes, que dites-vous : “il avait bien droit à une seconde chance” ? Ce n’est pas comme si l’écrasante majorité des Djandoubi étaient déjà des individus dépourvus de passé judiciaire, des agneaux subitement changés en loups. Ce sont le fruit d’un terreau démoniaque abondamment cultivé et parfaitement irrécupérable.

    Quand à les condamner, en somme, aux travaux forcés jusqu’à la fin de leurs jours, ce n’est, ni plus, ni moins, que de l’esclavage. De nombreuses personnes que je connais, qui sont contre la peine de mort, sont justement en faveur de ce type de traitement parce bien plus inhumain à leurs yeux que la relative mansuétude de la guillotine.

    Au fond, vous ne préconisez qu’une autre loi du talion, en apparence adoucie mais qui procède du même ressort : le meurtrier devra, par compensation, passer sa vie à “réparer” son crime.

    De deux choses l’une :

    – Soit il n’y a pas de vie après la mort et je ne vois pas en quoi il serait meilleur qu’un individu soit forcé pour le restant de ses jours à réparer ce qui n’est pas réparable, au motif de l’utilité et au prix de sa dignité.
    – Soit il est une vie après la mort et il ne paraît pas nécessaire de passer un demi siècle derrière des barreaux pour préparer son âme au jugement céleste.

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