La catastrophe de Fukushima a fait naître dans différents quartiers de Tokyo, une nouvelle génération d’entrepreneurs attirés par les perspectives alléchantes du marché des énergies renouvelables.
Au carrefour de Hachiko à Shibuya, haut lieu de la mode et des affaires, le balai incessant des voitures et des piétons qui investissent la place à tour de rôle est à l’image de cette société japonaise toujours empreinte de respect et encore plus dynamique depuis la catastrophe de Fukushima.
Cet événement dramatique est dans toutes les têtes mais il est absent des discours. La discrétion des Japonais n’incite pas facilement à la confidence. C’est en instaurant un climat de confiance que l’on comprend l’état d’esprit qui prédomine. La réalisation de soi dans l’urgence pour s’affranchir de la peur.
La simple évocation de Fukushima suffit à comprendre que le traumatisme est encore présent. Il sert de catalyseur à des initiatives audacieuses dans un contexte économique pour le moins morose. Il n’empêche pas des sociétés d’accroître leur présence dans le domaine des énergies renouvelables gérées par des technologies intelligentes à l’image de la « smart city » lancée par Panasonic au sud de Tokyo.
La catastrophe de Fukushima a fait évoluer l’approche énergétique des entrepreneurs même si la politique conduite par Shinzo Abe et appuyée par le gouverneur de Tokyo récemment élu a confirmé l’orientation en matière de nucléaire.
Cette politique ne fait pourtant pas l’unanimité. Sayaka, le directeur d’une société de panneaux solaires à Shibuya, est l’illustration de cette nouvelle génération. « La prédominance du nucléaire et notre dépendance vis à vis de cette énergie a déjà conduit à notre perte et notre gouvernement poursuit le mouvement. Faut-il un deuxième Fukushima pour que nos dirigeants prennent conscience de l’incohérence de leur politique ».
Si au sein du gouvernement, les projets alternatifs sont assez bien accueillis et soutenus financièrement par un système d’incitations aux énergies renouvelables mis en place en juillet 2012, sa volonté politique demeure ancrée dans l’ère du nucléaire.
L’enjeu pour Shinzo Abe est de parvenir au démantèlement de Fukushima vivement critiqué tant sur le plan humain qu’environnemental ainsi qu’à la mise en oeuvre d’une politique énergétique innovante.
À Akihabara, dans le quartier dédié à l’électronique, plusieurs sociétés créées depuis l’accident de Fukushima ont parié sur l’accroissement rapide des « smart technologies » liées aux énergies renouvelables qu’ils souhaitent voir se développer rapidement.
L’une d’entre elles gérée par Junsu, un Sud-Coréen, développe des équipements facilitant la production et la gestion de l’énergie de manière intelligente. L’entreprise dont les résultats sont florissants a même chargé des lobbyistes pour mener une fronde contre la politique actuelle. « Mon entreprise est dépendante de la politique du gouvernement, il n’est pas question que je me la laisse imposer ».
Avant d’espérer changer la politique, les tenants d’une nouvelle orientation vont devoir patienter. Le redémarrage progressif à l’été 2014 des centrales de l’archipel respectant les nouvelles normes ne plaide pour le moment pas en leur faveur.
Le marge de manoeuvre du gouvernement de Shinzo Abe est pourtant très limitée s’il veut retrouver la confiance des japonais encore traumatisés par la catastrophe de Fukushima dans un pays qui concentre un cinquième des tremblements de terre de la planète tout en étant victime de typhons et de tsunamis.
Dans les rues de Tokyo, les Tokyoïtes sont encore suffisamment marqués par l’événement trois ans après pour demander aux étrangers qu’ils rencontrent s’ils perçoivent une différence. Il n’en n’est rien. La seule différence constatée est liée aux avancées technologiques et aux changements de mentalités qui peuvent faire évoluer le cours de l’histoire.
De notre correspondant à Tokyo.
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