Le projet de loi sur le « mariage » pour les couples de même sexe, Marriage (Same Sex Couples) Bill, est débattu par la Chambre des Lords après son adoption en dernière lecture à la Chambre des Communes le 21 mai dernier. Cette loi, si elle est adoptée, concernera l’Angleterre et le Pays de Galles, deux régions du Royaume-Uni où l’adoption par les duos homosexuels est déjà possible depuis 2002 (l’Écosse débat actuellement de son propre projet de loi pour redéfinir le mariage). Lors de son dernier passage devant la Chambre des Communes, des députés conservateurs ont voulu proposer un amendement étendant aux couples homme-femme les unions civiles accessibles aux duos homosexuels depuis 2005, ce qui aurait de fait bloqué pour plusieurs mois l’adoption de cette loi qui vise à redéfinir le « mariage » pour répondre aux attentes du lobby gay. Pour faire adopter son projet de loi, le premier ministre David Cameron a donc dû passer un accord avec le parti travailliste dont certains députés souhaitaient eux aussi étendre les unions civiles à tous au nom de l’égalité, une réforme qui représenterait cependant une charge importante pour le budget de l’État. Au final, les Travaillistes ont voté contre l’amendement avec les Libéraux et la petite moitié de députés conservateurs restés fidèles à leur leader.
Après la récente défaite du parti conservateur aux élections locales, la révolte de la base du parti s’intensifie face à un premier ministre convaincu qu’il doit « moderniser » son parti pour le faire gagner. « Moderniser », pour David Cameron, signifie lui faire abandonner ses valeurs conservatrices pour épouser les valeurs, si on peut encore parler de valeurs, de la gauche libertaire. Même si le programme du parti conservateur ne prévoyait pas la dénaturation du mariage lors de la campagne électorale qui avait précédé les dernières élections nationales en 2010, cette ligne a déjà coûté cher au parti conservateur qui n’a pas réussi, alors qu’il était donné grand favori, à obtenir une majorité absolue au Parlement. C’est une situation très rare au Royaume-Uni où le système uninominal à un tour favorise l’émergence de majorités absolues. Malgré ce faible résultat en 2010, un sondage commandé par la Coalition pour le Mariage juste avant les élections locales du 2 mai 2013 montrait qu’un quart des électeurs qui avaient malgré tout voté conservateurs en 2010 comptaient désormais voter pour l’UKIP (le « parti pour l’indépendance du Royaume-Uni ») de Nigel Farage à cause de la question du mariage gay et que leur désertion était définitive. Du coup, l’UKIP, qui s’oppose à la redéfinition du mariage, est arrivé juste derrière le parti conservateur aux élections locales, et est même devenu le deuxième parti après le parti travailliste en termes de votes si l’on tient compte uniquement des circonscriptions où il présentait des candidats, reléguant ainsi le parti conservateur à la troisième place.
David Cameron, qui prétend que c’est justement à cause de son attachement à cette institution qu’il souhaite étendre le mariage aux duos homme-homme et femme-femme, s’est aussi aliéné les leaders de toutes les religions du Royaume-Uni. Dans une lettre ouverte au premier ministre publiée samedi dernier par le Daily Telegraph, des leaders anglicans, catholiques, protestants, coptes, orthodoxes, musulmans, hindous, sikhs et bouddhistes dénoncent le démantèlement de la famille comme fondement de la société, l’absence de véritable débat démocratique, les cas de personnes, notamment des enseignants, renvoyées de leur travail pour avoir exprimé leur soutien à la famille traditionnelle ainsi que le risque que la nouvelle loi représentera, si elle est adoptée, pour les libertés religieuses et la liberté d’expression.
Contrairement à ce que suggère la propagande des médias mainstream, la société britannique est en fait très divisée sur la question de la redéfinition du mariage. Et paradoxalement, si la fuite de militants et d’électeurs vers l’UKIP se poursuit, le passage en force de David Cameron sur la question de la redéfinition du mariage pourrait signer la mort du parti conservateur et provoquer… la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne puisque cette sortie fait partie du programme du parti de Nigel Farage. La promesse orale faite par David Cameron d’un référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’UE si son parti revient au pouvoir après les prochaines élections législatives ne sera pas de nature à faire revenir les électeurs conservateurs dans le giron d’un parti qui n’a plus de conservateur que le nom.
Cela fera-t-il réfléchir ceux parmi les leaders de l’UMP qui promettent déjà, en cas de retour au pouvoir, de consolider la loi sur le « mariage pour tous » spécial pour duos homosexuels en se contentant de la corriger ? Pourtant l’exemple de la Californie le montre : il est tout à fait possible de revenir sur la redéfinition du mariage imposée par le lobby gay et d’inscrire dans la constitution, puisque c’est devenu nécessaire, la nature réelle de cette institution millénaire. De son côté, dans une interview accordée à Valeurs Actuelles, Marine Le Pen s’est déjà engagée à abroger la loi Taubira si le FN arrive au pouvoir.
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