Lorsque nous avons appris le « coup de griffe » lancé par David Cameron au gouvernement français, nous avons benoîtement cru que la Grande-Bretagne allait offrir des conditions particulières aux entreprises françaises qui décideraient de s’installer de l’autre côté de la Manche, un petit peu à l’instar du « tapis rouge » que l’État français déroule devant les investisseurs qataris… Mais voilà, il ne faut pas rêver. Cameron n’est pas Hollande et les politiques britanniques sont dans l’ensemble un tantinet plus pragmatiques que leurs homologues français. Pourquoi offrir des conditions particulières quand la règle est suffisamment attractive et que vos voisin font tout pour la rendre de jour en jour plus attractive ?
Tenez, deux jours après avoir pris une leçon de réalisme économique en public au G20, comment réagit le gouvernement français ? En alourdissant la fiscalité et les prélèvements sur les entreprises! Royal, non ? Oups, excusez moi, Madame Trierweiler, je ne l’ai pas fait exprès, ne tapez pas, je voulais dire : « Normal » (comme notre Président), non ?
Trêve de plaisanteries, quand deux mégères se crêpent le chignon au sommet de l’État, cela fait les grand titres de la presse française, mais quand notre gouvernement décide de saigner à blanc le peu d’entreprises qui reste en France, vous ne trouvez les infos que distillées au compte gouttes, fractionnées en plusieurs entrefilets ou articles.
Clairement :
– Les dividendes versés aux actionnaires seront taxés à hauteur de 3% au niveau de la société distributrice. Nous sommes bien d’accord que ces 3% viennent en sus de la taxation en aval, CSG/CRDS et réintégration au résultat ou aux revenus selon que nous soyons dans le cas d’un personne morale ou physique. Nous sommes donc bien d’accord qu’à périmètre identique, une société française rémunérera forcément moins ses actionnaires que ses concurrentes étrangères… Monsieur Cameron vous dit merci !
– La taxe sur les transactions financières sera relevée, avant même d’avoir commencé à fonctionner, pour passer de 0,1% à 0,3% ! 200% d’augmentation avant même d’avoir vécu… Du jamais vu ! Si à 0,1%, un certain nombre d’opérateurs se posaient la question de quitter la place de Paris pour rejoindre Londres, à 0,3%, nous avons la réponse ! Monsieur Cameron vous dit merci !
– Le tourisme est particulièrement florissant à Paris, première destination touristique mondiale. Le rêve de Londres est de détrôner Paris et nous nous souvenons de la lutte épique entre les deux capitales pour obtenir les JO. Le Premier ministre britannique de l’époque, Tony Blair, avait dit que ces Jeux seraient le tremplin permettant cette relance touristique de Londres. Depuis, la crise, le coût de l’organisation, le coût des infrastructures avaient laisser dire qu’en fait Paris s’en tirait beaucoup mieux en ayant perdu (typiquement français, ça, de chercher à transformer un défaite en victoire). C’était sans compter sur Monsieur Hollande qui va décréter ces jours ci une taxe de 8,5% sur les nuits d’hôtel de plus de 200 euros !!! Cela s’appelle « marquer contre son camp », même l’équipe française de foot ne l’a pas encore fait ! Monsieur Cameron vous dit merci !
– Actuellement, les entreprises payent en année N des acomptes d’impôt sur les sociétés (IS) en se basant sur leurs résultats de l’année N – 1, qui peuvent avoir été réduits par l’imputation de déficits plus anciens. Elles règlent ensuite le solde de leur IS de l’année N en avril N + 1. Désormais, les acomptes d’IS se fonderont sur le résultat de l’année précédente, mais avant toute imputation de déficit. Évidemment, le calcul du montant final ne changeant pas (pour l’instant), cela ne semble pas avoir d’incidence… Sauf pour la trésorerie des entreprises. Cette trésorerie qui est le point faible d’une très grande majorité d’entreprises françaises et que tant d’acteurs ont essayé dans les années passées de résoudre en légiférant sur les délais de paiement, en mettant en place des médiateurs de crédit pour inciter les banques à intervenir… Encore une embûche supplémentaire pour les entreprises françaises. Monsieur Cameron vous dit merci !
– À partir du mois prochain, les sociétés changeant d’activité perdront leur stock de déficits anciens à imputer sur les bénéfices futurs. Là encore, cela semble anodin, sauf que, techniquement, il n’y aura plus aucun intérêt à essayer de sauver une entreprise en la réorientant sur une nouvelle activité. L’intérêt sera de la fermer définitivement et d’ouvrir une nouvelle structure pour la nouvelle activité… En Grande Bretagne, peut-être ? Monsieur Cameron vous dit merci !
“On a l’impression que les entreprises sont bien plus l’ennemi de Monsieur Hollande que la finance.”
– Les abandons de créance au profit d’une filiale ne seront plus déductibles de l’IS, sauf en cas de relations commerciales entre les deux sociétés. Ce point est marginal. Néanmoins, c’est vrai que lorsque qu’une société mère évalue l’intérêt de sauver ou non une filiale, l’abandon, souvent du compte courant, dégrade le bilan mais se trouve tempéré par l’intégration de la perte constatée dans le résultat et la réduction fiscale que cela entraîne. Ceci, qu’il s’agisse d’abandon volontaire ou contraint. Encore un point qui ne fera qu’augmenter la taxation des entreprises, compliquer un petit peu plus leur rentabilité et les amener à réfléchir à deux fois avant d’aider une jeune entreprise en prenant une part minoritaire et amener du compte courant. Une façon d’aider les créations en moins ! Monsieur Cameron vous dit merci ! (Ceci étant, cette mesure est à surveiller car si, pour l’instant, elle ne concerne que les personnes morales, il se peut qu’elle soit aussi très vite étendue aux personnes physiques…)
– Dans le même esprit de tout faire pour contrer la création d’entreprise, le gouvernement a publié ce matin au Journal Officiel l’avis abaissant de 50 à 45% la part du reliquat des droits à l’assurance-chômage accordés aux créateurs d’entreprise demandeurs d’emplois. Evidemment que 5% des droits restant ouverts, cela ne représente pas grand chose, mais justement, lorsque cela ne représente pas grand chose, on a tendance à interpréter ce genre de mesures comme symboliques de la volonté politique. Une volonté de freiner la création d’entreprise. Pour quelles raisons ? Idéologiques ? Qu’importe, sans création d’entreprises, pas de dynamisme économique. La nature ayant horreur du vide, les entreprises qui ne se créeront pas chez nous se créeront ailleurs… Monsieur Cameron vous dit merci !
– Histoire de bien rendre la vie impossible aux entreprises, dont on a l’impression qu’elles sont bien plus l’ennemi de Monsieur Hollande que la finance, tout un tas de petites dispositions administratives, comme seule la France et quelques pays du tiers monde savent en imaginer, viennent de voir le jour.
Par exemple, la valorisation des échanges entre filiales. Jusqu’à aujourd’hui, si l’administration contestait cette valorisation, elle devait argumenter et un tribunal tranchait. Et bien fini, l’État de droit, désormais, comme dans un litige fiscal, l’administration bénéficie de l’inversement de la charge de la preuve. Autrement dit, l’administration pourra décréter de manière totalement arbitraire qu’une valorisation d’échange entre filiales, ou sociétés d’un même groupe, est surévaluée et ce sera à l’entreprise concernée d’argumenter, de prouver et éventuellement d’aller en justice pour obtenir gain de cause. J’en connais quelque-unes que ça risque vite de « gaver » comme disent les jeunes…
Allez, une petite dernière : Désormais, la déductibilité des intérêts d’emprunt sera plafonnée. Encore une mesure qui va augmenter le coût des investissements et du financement de la trésorerie. Super !
N’oublions pas la suppression de la TVA sociale mort née et son corollaire le maintien des charges, n’oublions pas la retraite à 60 ans pour quelques travailleurs qui s’accompagne d’une augmentation des cotisations retraite, n’oublions pas l’augmentation du SMIC, n’oublions pas le durcissement des conditions de licenciement…
Pour tout cela, Monsieur Cameron vous dit MERCI, Monsieur Hollande !
Quant à moi, excusez moi, je dois vous laisser, j’ai mon cours d’anglais par Skype dans cinq minutes…
> Cet article est publié en partenariat avec MaVieMonArgent.info
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