L’essayiste et historien Dominique Venner s’est suicidé mardi 21 mai 2013 à la cathédrale Notre Dame d’une balle de revolver. Une nouvelle aussi choquante qu’inattendue pour beaucoup qui auront lu avec passion tant ses différents ouvrages historiques et politiques que les numéros de La Nouvelle Revue d’Histoire qu’il a dirigée depuis sa fondation. Ancien combattant et militant politique, il fut de tous les fronts de son époque et laissera l’image d’un condottiere des lettres et des armes.
Né en avril 1935, Dominique Venner est très tôt confronté au combat en faveur de la France puisqu’il s’engage dès 1954 dans la Guerre d’Algérie. Il y combattra jusqu’en octobre 1956 où il sera démobilisé, mais le combat se poursuit sur d’autres fronts pour lui. En effet, le 7 novembre 1956, il participe au sac du siège du Parti communiste français en réaction à la répression de l’insurrection de Budapest par les troupes soviétiques. Aussitôt après, il prend part à la fondation du Parti nationaliste avec Pierre Sidos, puis au Mouvement populaire du 13 mai du général Chassin. Son soutien actif à une branche de l’OAS lui vaut un séjour de 18 mois dans les geôles de la Santé. Après sa libération en 1962, il rédige son premier ouvrage, le manifeste Pour une critique positive, souvent considéré comme l’équivalent droitier du Que faire ? de Lénine. C’est alors que se construit définitivement sa pensée idéologique. Autant influencé par Charles Maurras qu’Antonio Gramsci et Lénine, il prône la constitution d’une organisation nationaliste révolutionnaire « formée par le groupement de tous les militants acquis au nationalisme, dévoués et disciplinés ». Il commit des erreurs, notamment son rejet du christianisme et son antiaméricanisme incessant, mais il eut également d’immenses mérites, comme d’avoir promu la notion d’identité et de tradition ainsi qu’une valorisation élitiste de la force. En janvier 1963, il fonde et dirige le mouvement Europe-Action ainsi que son journal avant de contribuer à la fondation du GRECE en 1969 et de créer la même année l’Institut d’Etude Occidentale (IEO) avec Thierry Maulnier, essentiellement axé sur la lutte contre le communisme et les valeurs de l’Occident. Cet institut disparaît en 1971 après avoir diffusé sept numéros de Cité-Liberté.
C’est alors une autre étape de sa vie et de sa carrière qui s’ouvre à Dominique Venner. Laissant définitivement de côté son engagement politique et idéologique, il va se consacrer définitivement à son œuvre d’essayiste et d’historien. Embrassant des thèmes aussi variés que la Guerre de sécession, la Guerre civile russe, la résistance ou la chasse, Dominique Venner va devenir un auteur prolixe et talentueux, doté d’un style très percutant et entraînant, abordant des options et des thèmes souvent délaissés par l’historiographie officielle, n’hésitant pas à s’affranchir du politiquement correct, voire de l’historiquement correct. Le blanc soleil des vaincus (1975), Gettysburg (1995), Les blancs et les rouges, histoire de la guerre civile russe (1997), Histoire critique de la résistance (1995), Histoire de la collaboration (2000), Histoire du terrorisme (2002) sont autant de pages d’histoire violente (les thématiques guerrières y sont omniprésente) merveilleusement contées. L’auteur a parfois du mal à se défaire d’un certain parti pris (notamment avec De Gaulle, la grandeur et le néant, 2004) mais il nous livre toujours un ouvrage d’un grand intérêt. Le cœur rebelle (1994), essai semi-autobiographique relatant notamment son expérience en Algérie, est sans doute le plus émouvant et édifiant. Son dernier ouvrage paru était L’imprévu dans l’histoire : Treize meurtres exemplaires, en 2012. Parallèlement, il a dirigé La Nouvelle Revue d’Histoire depuis sa création en 2002. Revisitant des thématiques historiques diverses allant de la France de Louis XIV à la collaboration de gauche, de manière souvent novatrice et anticonformiste, la revue compta des collaborateurs renommés comme François-Georges Dreyfus, Bernard Lugan, Philippe Conrad, Jacques Heers, Henry Bogdan, Jean Tulard et bien d’autres.
Après Jacques Heers et François-Georges Dreyfus, c’est encore un amoureux de l’histoire et un grand auteur qui vient de partir autant qu’un homme de convictions. Ayant eu le plaisir et l’honneur de le rencontrer à quelques reprises, je me permets de lui rendre ce modeste hommage, à lui-même et à son œuvre, en lui souhaitant le repos éternel. Et que son œuvre soit poursuivie par d’autres après lui.
Dominique Venner présentant La Nouvelle Revue d’Histoire :
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